Permis de Conduire : Frustration en Point de Mire

10 years, 4 months ago - 22 November 2013, Le Mauricien
Permis de Conduire : Frustration en Point de Mire
Cela fait six mois que le permis à points a été introduit à Maurice, et la grogne continue du côté des conducteurs. Certains rechignent, estimant avoir été trop sévèrement sanctionnés pour des infractions qu’ils jugent minimes. Deux chauffeurs témoignent.

Quatre contraventions pour excès de vitesse en moins d’un mois. Cela équivaut à Rs 8,000 d’amende et une ponction de huit points sur le permis de conduire. Avouez que cela mettrait n’importe qui en rogne, surtout si la personne sanctionnée affirme être respectueuse du code de la route. C’est à vous rendre vert de rage ou vous contraindre à rire jaune…
C’est le cas de Robert, qui n’avait écopé aucune contravention en cinq ans. En dix ans, il n’a été impliqué que dans un seul accident : un chauffeur avait perdu le contrôle de sa voiture pour heurter la sienne à l’arrière.
Imran, qui est chauffeur de taxi depuis une vingtaine d’années, raconte qu’il n’a jamais commis de grosses infractions. Il a été pénalisé pour s’être garé dans un lieu non autorisé ou pour ne pas avoir son permis de conduire sur lui. Mais rien de grave, dit-il. Or, à ce jour, huit points ont été enlevés de son permis pour excès de vitesse “mineurs”.

Jackpot.
C’est un sentiment d’injustice qui se manifeste chez nos deux interlocuteurs. Robert raconte ses mésaventures : “La première contravention remonte au 5 septembre à Candos. La limite autorisée est de 60 km. Je me suis fait flasher à 65 km/h. Une semaine après, à la route Sadally, le radar a détecté que je roulais à 66 km/h (limite autorisée 60 km/h). Sur la même route, quelques jours plus tard, j’ai été “flashé” à 64 km/h.” Robert est conscient qu’il est coupable de ses actes, mais trouve que les nombreux radars que l’on trouve sur nos routes depuis neuf mois sont un véritable jackpot pour le gouvernement. Avis que partage Imran, qui affirme que “gouvernma pe fer lor lor nou latet ek sa bann speed camera la ek so bann nouvo lalwa la”.
Les derniers chiffres indiquent que du 24 juin au 1er septembre, les radars ont rapporté Rs 45 millions à l’État, pour 22,000 automobilistes verbalisés. On peut le déchiffrer ainsi : le gouvernement engrange Rs 30,000 par heure ou Rs 5 millions par semaine. Car chaque contravention pour excès de vitesse coûte Rs 2,000 à l’automobiliste.
Dans le cas de Robert et d’Imran, l’ardoise est lourde. Ils auront à payer Rs 6,000 et Rs 8, 000 respectivement pour une poignée de kilomètres. Et ils se retrouvent avec 6 et 8 points de pénalités respectivement. Cela parce qu’ils sont coupables d’avoir dépassé la limite autorisée par cinq à six kilomètres. Dans le cas de Robert, sur une route à double voie où “je roulais, au moins une fois dans les trois cas, à moins de 60 km/h”.

Vigilance.
Conscient qu’il n’a d’autre choix que de se soumettre aux décisions prises par l’État, Imran estime que les autorités devraient envisager un assouplissement de la loi. “Car il n’est pas normal qu’alors que je suis auteur d’infractions mineures, je sois sanctionné au même titre que celui qui commet des délits plus graves.”
Robert se dit contrarié par la décision de décideurs qui ont choisi d’imposer des limites de vitesse qui, à ses yeux, n’ont aucun sens. Qui plus est, le chauffeur qui dépasse la limite par quatre kilomètres se retrouve dans la même catégorie que celui qui dépasse la limite autorisée par 24 km. Robert ajoute : “Ils pensent avoir eu l’ingénieuse idée de réduire le nombre d’accidents en mettant en place des radars. Alors que selon le Bureau des Statistiques, plus de 80% des blessés sur nos routes et plus de 95% des accidents ne sont pas liés aux excès de vitesse. Ils choisissent de copier ce qui se fait dans les pays de l’Union européenne, en se disant que cela va marcher chez nous.”
En attendant que l’État veuille bien revoir les lois concernant les petites infractions, Imran compte bien être plus vigilant sur la route. “Car pour seulement quelques kilomètres de trop, je pourrai me retrouver à ne plus pouvoir exercer mon métier de chauffeur de taxi. C’est mon seul gagne-pain. Je n’ai donc pas droit à l’erreur.”

Infraction                                Nombre de points
 
Non-port du casque de moto                            2 à 4
Refus de céder le passage prioritaire                    3 à 6
Refus de s’arrêter lors d’un accident                    4 à 8
Refus d’obtempérer aux instructions de la police            2 à 4
Usage du téléphone au volant                        2 à 4
Usage de véhicule sans les feux prescrits durant la nuit        3 à 6
Cargaison non sécurisée sur véhicule                    3 à 6
Non-respect de la priorité au passage piétonnier            4 à 6
Dépassement de véhicule au passage piétonnier            4 à 6
Excès de vitesse (par moins de 25 km/h) à la limite            2 à 4
Excès de vitesse (par plus de 25 km/h) à la limite            4 à 6
Excès de vitesse (par plus de 50 km/h) à la limite            6 à 8
Non-port de la ceinture de sécurité au volant                2 à 4
Dépassement sur la ligne blanche                        2 à 4
Non-respect des panneaux de signalisation                2 à 4
Conduite dangereuse                                8 à 10
Conduite imprudente                                8 à 10
Non-respect des voies sur l’autoroute                    3 à 6
Coups et blessures par imprudence                        8 à 10

Les infractions les plus courantes
L’excès de vitesse (par moins de 25 km/h), l’usage du téléphone au volant et le non-port de la ceinture de sécurité au volant sont les trois infractions les plus courantes depuis l’introduction du permis à points en mai dernier. Les chiffres couvrant la période du 1er septembre au 9 novembre sont les suivants : 14,463, 576 et 453 respectivement, pour les trois délits mentionnés plus haut. Durant cette même période, huit contraventions ont été infligées à des conducteurs ayant dépassé la limite de vitesse par plus de 50 km/h et 224 à ceux qui ont excédé par plus de 25 km/h mais moins de 50 km/h la vitesse autorisée.
La limite des 15 points n’a été atteinte par aucun conducteur jusqu’à ce jour, précise l’inspecteur Bijaye Rambhursy. “À voir les chiffres, cela ne devrait pas tarder”, avance-t-il. Quatre personnes auraient atteint les quatorze points, tandis que 18,370 conducteurs ont cumulé un total de 2 points et 25,000 un total de 4 points.