Flambée des prix: le chiffre d’affaires des stations-service accuse un coup de pompe

il y a 2 années, 6 mois - 30 Mai 2022, lexpress.mu
Flambée des prix: le chiffre d’affaires des stations-service accuse un coup de pompe
Est-ce que ça roule pour les autobus et le métro ?

Les prix des carburants n’ont cessé de grimper au cours des derniers mois. Si les consommateurs broient du noir, la situation est loin d’être rose pour les stations-service, en panne de «cash-flow». Quel est le «feeling» du côté des «fillings» ?

«Avant, si on achetait un camion de 30 000 litres d’essence à Rs 40 le litre, il fallait payer Rs 1,2 million. Puisque désormais le prix de l’essence est de Rs 74,10 par litre, il faut multiplier ce nouveau tarif par ce volume, ce qui implique plus de coûts fixes, donc plus d’investissements. Cette différence résultant de la hausse du prix représente le manque de cash-flow», explique Bhim Sunnassee. Responsable de la station-service Shell de Rose-Hill et président de la Petrol Retailers’ Association, il explique que pour combler ce manque de cash-flow, il lui faut contracter un emprunt bancaire auquel s’ajoutent les intérêts.

Selon lui, une grosse majorité de stations-service, environ 150 à opérer à Maurice, sont dans la tourmente. D’autant plus que leurs revenus ont chuté drastiquement. D’ailleurs, le jeudi 26 mai, il a envoyé une lettre au Premier ministre pour demander son intervention face à cette situation qui affecte la rentabilité des stations-service. «En tant que chef du gouvernement, il doit prendre des mesures pour nous soutenir. Il faut puiser davantage de notre poche pour investir dans l’approvisionnement de l’essence. Paradoxalement, la marge de profit reste intacte tandis que nos ventes sont en baisse.»

Bhim Sunnassee estime que, depuis la dernière majoration du prix de l’essence, des conducteurs réduisent leurs trajets et leur consommation, d’autant qu’ils n’ont aucune compensation par rapport à la flambée du prix du carburant. Il estime qu’une perte d’environ 1 500 à 2 000 litres en termes de ventes par jour est observée dans certaines stations-service. «Si sa kontigne koumsa, pou bien difisil pou roul filing. Lavant pe besé net me fixed costs pe monte. Dimoun nepli plin tink», ajoute-t-il. Si auparavant, un conducteur pouvait faire le plein avec Rs 2 000, la note s’élève désormais de Rs 3 000 à Rs 3 500.

«La vente des produits pétroliers a chuté.»

Certes, le sort des stations-service est préoccupant, comme en témoigne Subash Hurpaul, gérant d’Indian Oil à Souillac. «Définitivement, la consommation d’essence est en baisse. Le client qui s’approvisionnait pour Rs 500 de carburant, continue à le faire mais avec un volume réduit, ce qui fait que nous en vendons moins également.» Selon lui, la baisse varie selon les régions. De son côté, 20 % à 25% depuis la majoration du 18 mai 2022, en comparaison à 5 % à 10 % auparavant. Revenant sur le problème de cashflow, il indique que les gérants doivent trouver et injecter plus d’argent pour s’approvisionner en essence alors que les ventes s’amenuisent. «Notre cash-flow est également affecté par la différence drastique entre les frais d’avant et ceux de maintenant. Par exemple, si on payait un camion d’essence à Rs 700 000, cela coûte plus d’un million de roupies», confie-t-il.

Un autre gérant de station-service dans le Nord abonde dans le même sens : «La vente des produits pétroliers a chuté. J’ai remarqué une baisse significative. Actuellement, elle est de 20 %. Mais depuis le Covid-19, couplé à la flambée des prix, la consommation d’essence a généralement baissé de 35 % à 40 % dans l’île.» En sus de la réduction de leurs frais d’essence, les conducteurs privilégient uniquement des déplacements essentiels. Selon lui, la marge de profit aurait dû augmenter. Hélas, les gérants des filling stations n’ont rien vu venir jusqu’à présent.

Les conséquences de la flambée des prix sur les stations-service induisent-elles un refoulement des automobilistes vers les transports en commun ? «Effectivement, nous avons remarqué une hausse dans le nombre de passagers d’autobus depuis les majorations du prix de l’essence», déclare le General Manager de la Corporation nationale de transport (CNT), Rao Ramah. De son côté, le secrétaire de la Fédération des autobus individuels, Sunil Jeewoonarain, affirme ne pas percevoir une hausse visible des passagers. «Il faudrait avoir les chiffres et un peu plus de temps pour des conclusions plus élaborées. Nous avons le volume habituel de passagers», souligne-t-il.

Pour sa part, le Traffic Manager d’United Bus Service (UBS), Yousouf Sairally, attend l’évolution des fluctuations de passagers d’ici la semaine prochaine pour avoir une idée plus précise. «Nous n’avons pas encore ressenti les effets sur le volume d’usagers d’autobus à la suite de la majoration des prix de l’essence depuis une semaine. Dans les jours à venir, cela pourrait sans doute s’accentuer.» Il observe aussi qu’en fin de semaine, la route était plus fluide avec moins de voitures en circulation. «S’il y a une hausse dans le nombre de passagers par autobus, cela se répercutera la semaine prochaine», conclut-il.

Au niveau de Metro Express Ltd (MEL)? «Nous notons une hausse dans le nombre de passagers depuis le lancement du tronçon Quatre-Bornes/ Phoenix. Nous ne pouvons vous dire si c’est à cause de l’augmentation du prix de l’essence mais il est évident que cela survient en raison de l’entrée en opération de la ligne entre Quatre-Bornes et Phoenix», soutient la direction de MEL. Selon cette dernière, il s’agit «d’une hausse conséquente» de 23 %, ce qui est encourageant. Cela indique, dit-elle, que les autres phases qui seront lancées seront encore plus fructueuses pour MEL. «Les nouveaux passagers profitent du confort et de la facilité qu’offre le métro mais aussi des avantages de la MECard. Less offres en cours permettent aux passagers de profiter de 5 à 10% de rabais sur leur prochain trajet», ajoute notre source.

Parallèlement, d’autres offres permettent aux passagers de dépenser moins. «Le métro a fait ses preuves à Maurice comme un mode de transport innovant, confortable, efficace et rapide. Nous voulons et nous sommes en train de révolutionner le transport en commun et d’améliorer la mobilité, connectivité et l’accessibilité tout au long de l’alignement du métro», précise la direction de MEL. Elle indique que le nombre de passagers continue à augmenter graduellement. «Nous mettons les bouchées doubles pour compléter la Phase 2C qui connectera Phoenix à Curepipe et la Phase 3 de Rose-Hill à Réduit via Ebène, dont les travaux avancent très bien», poursuit notre interlocuteur. Le public passager pourra donc très bientôt profiter du métro dans les cinq villes principales. Des opportunités de développement intégré et multimodal près des stations de métro et des terminaux urbains sont aussi prévus.