Interdiction du thermique en 2035 : certains constructeurs pourraient avoir des passe-droits

il y a 2 années, 5 mois - 11 Juin 2022, automobile-magazine
Interdiction du thermique en 2035 : certains constructeurs pourraient avoir des passe-droits
Ce que beaucoup appellent déjà "l’amendement Ferrari" pourrait permettre aux constructeurs vendant entre 1000 et 10 000 voitures par an d’échapper au bannissement progressif du moteur thermique.

Ils pourraient continuer temporairement de bénéficier des dérogations sur les objectifs CO2, même si, évidemment, rien n'indique que ladite exonération sera nécessairement accordée.

Les lobbyistes italiens, emmenés par le parti des Conservateurs et réformistes européens, ont bien travaillé. Les marques de prestige qui font de petits volumes pourront les remercier même si, vous allez le voir, le cadeau n’est pas non plus monumental. Les constructeurs de luxe et de voitures de sport, qui bénéficiaient déjà de certaines largesses en matière d’objectifs CO2 ou de bruit à l’échappement, ont eu une autre faveur de Bruxelles qui leur accorde un petit sursis : initialement, leurs dérogations devaient prendre fin en 2030 pour les constructeurs vendant entre 1000 et 10 000 voitures par an, mais c'est désormais repoussé à 2036 selon l'amendement 121. Ces dérogations permettaient notamment à Aston Martin ou encore Ferrari (quand le cheval cabré écoulait moins de 10 000 voitures par an) d'avoir droit à des objectifs CO2 personnalisés à près de 300 g/km quand les constructeurs traditionnels devaient être sous les 130 g/km.

Concrètement, cela signifie qu'en théorie, si une dérogation est accordée à une marque de prestige, elle pourrait continuer de vendre des véhicules équipés de moteurs thermiques après 2035, date à laquelle l'objectif "CO2" de l'industrie auto "classique" sera ramené à 0 g/km. Mais le texte de loi ne dit pas pour combien de temps sont accordées ces fameuses dérogations. En clair, il est pour l'heure difficile de savoir quand les derniers moteurs à combustion seront réellement vendus par Bentley, Rolls-Royce, Lamborghini ou Aston Martin...

L’écologie pour les moins aisés, carte blanche pour les riches ?
Il est évident que ce sursis changera pas grand-chose à la face du monde avec ceux qui vendent moins de 10 000 voitures par an, et dont les kilométrages annuels sont faibles. L’amendement "Ferrari" (qui n'a pas été demandé par Ferrari, contrairement à ce que le nom indique) est d’autant plus cocasse que l’intéressé lui-même pourrait ne pas être concerné. En effet, l’année dernière, Ferrari a écoulé un peu plus de 11 000 voitures dans le monde, et ce sans SUV. Celui-ci arrivera dans les prochains mois et devrait porter Ferrari à de nouveaux records de ventes. Mais, qui sait, d’ici là, Ferrari pourrait trouver une parade pour passer brièvement sous la barre des 10 000 et bénéficier d’une rallonge de V12 et autres V8.

Non, cet amendement 121 n'infléchira pas le dérèglement climatique, même si ce sont les gouttes d'eau qui forment un océan. Au-delà du négligeable surplus carboné qui sera induit, c’est surtout l’image que cette modification pourra avoir auprès du grand public. Une décision qui pourrait faire grincer des dents alors que l’on demande à monsieur tout le monde de changer son véhicule pour un modèle plus récent et éventuellement électrique afin de circuler dans les ZFE. Une ZFE qui permet d'ailleurs à une Ferrari 812 Superfast d’être Crit’Air 1 !

Enfin, autre cadeau encore plus anecdotique mais ô combien symbolique : les marques qui vendent moins de 1000 voitures par an ne sont tout simplement pas concernées par l’obligation de 2035, ni 2036. Le client d’une Bugatti ou d’une Koenigsegg peut donc souffler, son parc automobile pourra toujours se marier idéalement à sa flotte de bateaux et d’hélicoptères ou de jets. D'ailleurs, les secteurs maritime et aéronautique ne sont en comparaison de l'automobile que peu impactés par le grand projet "climat" de l'UE, en dehors d'une taxe CO2 pour le maritime et de carburants dits "verts" dans le programme "ReFuelEU Aviation". L’honneur est sauf.

Rappelons quand même que le gros paquet de lois sur le climat sera à nouveau soumis au vote du Conseil européen à la fin du mois de juin, même s'il ne devrait pas y avoir de grosse surprise ou de retournement de situation