Quand des policiers «tras enn lavi»…

il y a 1 année, 3 mois - 18 Septembre 2023, lexpress.mu
Quand des policiers «tras enn lavi»…
C’est une pratique courante, si l’on en croit la majorité des automobilistes. «Bann gard-la rod enn lavi parfwa, sirtou lafin di mwa…» Si cette «coutume» est ancrée dans les «croyances» populaires, des faits viennent donner raison à ceux qui affirment que certains flics n’hésitent pas à demander «enn ti kas» en échange de faveurs…

Durant la semaine écoulée, une vidéo a fait le buzz. Elle a été vue, commentée et partagée par des centaines de personnes sur les réseaux sociaux. On y voit un policier en uniforme qui ‘accepte’ Rs 1 000 d’un motocycliste, qui en échange, ne prend pas de contravention. «Mo pa pé fer bezer avek ou. Mo pé pran zis sa Rs 1 000- la», peut-on notamment entendre dire le motard sur la vidéo en circulation.

Est-ce une pratique courante ? Non, affirment comme prévu des sources policières. «Il y a toujours des policiers intègres. Sinon personne n’écoperait de contravention. Mais des policiers ripoux, il en existera toujours dans toutes les unités.» L’argument mis en avant pour expliquer la demande de pot-de-vin dans certains cas : le salaire «dérisoire» des hommes en bleu, qui est loin d’être suffisant pour subvenir aux besoins d’une famille comme il se doit, affirment des sources. «Cela, alors que nous pratiquons un métier où il nous arrive de mettre nos vies en danger…»

L’opposition parle d’exode des Mauriciens, c’est avec raison, déplorent nos interlocuteurs. «Il n’y a qu’à voir les départs dans la force policière. Beaucoup ont préféré se tourner vers le Canada, l’Australie ou tout simplement changer de métier. Enn manev mason gagn plis ki nou par mwa...» D’ajouter qu’il faut faire ressortir que les policiers n’ont pas droit de faire un deuxième travail. «Mais par les temps qui courent avec la cherté de la vie, impossible de faire autrement.» L’on explique qu’il y a des policiersplanteurs, policiers-restaurateurs, policiers-chauffeurs... Et policierstraceurs aussi visiblement…

Par ailleurs, si certains n’acceptent ou plutôt ne demandent pas de pot-de-vin, il y a aussi l’acceptation des cadeaux sous plusieurs formes qui posent problèmes et fait débat. Le commissaire de police Anil Kumar Dip est lui-même visé par cela. Les allégations venaient de son ex-gendre qui l’accusait d’avoir obtenu des faveurs du Club Med d’Albion du temps où le haut gradé était Divisional Commander de la Western Division. Il avait loué six chambres, dont trois suites, à l’hôtel Club Med d’Albion durant le week-end du 3 au 5 août 2018. Mais «personne n’a payé», avait dénoncé l’homme qui s’est présenté à l’Independent Commission Against Corruption (ICAC) le 21 juillet 2021. «Il y a aussi des policiers qui ‘prennent’ par exemple du whisky, des parfums, entre autres...Si enn dimounn donn kado, pou kapav anket lor li apré ? Ou zot pou protézé ? Et surtout personne ne vous offrira des cadeaux coûteux sans attendre une quelconque protection en retour.»

L’Anti-Drug and Smuggling Unit est d’autant plus dans le viseur en ce qu’il s’agit de pots-de-vin et de «cadeaux» car ils côtoient des personnes qui ont de l’argent, des trafiquants qui officient comme informateurs dans certains cas. «Ils peuvent gagner gros, voire des milliers de roupies pour par exemple, ne pas enquêter sur le trafic ou donner des infos à des trafiquants qui sont sur le radar d’une équipe de la brigade. Il y a des cas où des arrestations s’avèrent infructueuses justement parce que quelqu’un de la police même a déjà vendu la mèche sur une éventuelle descente.»

Qui plus est, un autre policier a été arrêté par l’ICAC cette semaine, toujours pour une affaire de pot-de-vin allégué. Il s’agit d’un ancien officier de la Special Striking Team, Rakesh Unmar. L’arrestation du constable, affecté au poste de police de l’hôpital Victoria, fait suite à une enquête menée par l’ICAC après qu’une plainte a été déposée par une femme d’affaires qui l’accuse d’avoir sollicité un pot-devin de Rs 300 000. Il aurait proposé à la femme de faire annuler une perquisition en échange de cette importante somme d’argent.