Quatre Morts à Bel-Étang, Le Chauffeur du Camion : « J’Ai Bu Trois Rhums la Veille »

il y a 11 années, 6 mois - 12 Juin 2013, The Défi Media Group
Quatre Morts à Bel-Étang, Le Chauffeur du Camion : « J’Ai Bu Trois Rhums la Veille »
L’accident de Sorèze avait choqué toute l'île Maurice, avec son bilan de dix morts. Voilà que ce matin du 11 juin le pays s'est réveillé sous le choc. Un camion a percuté de plein fouet une voiture en stationnement vers 5h40.

Ce camion de la mort a tué quatre personnes, dont un enfant de 11 ans. Ils étaient neuf occupants dans la voiture. Le chauffeur du camion Bhajansing Beeharry a été testé positif à l'alcotest.

Bhajansing Beeharry, alias Satish, 58 ans, avait quitté son domicile à Sébastopol à bord de son véhicule pour récupérer des travailleurs à Bramsthan. À hauteur de Bel-Étang, le camion percute de plein fouet une voiture blanche garée au bord de la route en direction de Médine Camp-de-Masque.

Le camion a traîné la voiture sur plusieurs dizaines de mètres. La partie arrière a été complètement écrabouillée, tuant quatre personnes parmi les neuf occupants de la voiture. Dans sa déclaration à la police, le chauffeur du camion explique : «J'avais bu trois rhums la veille».

Dans cet accident tragique, Louis Michael Phillipe, alias Bouta, 37 ans, habitant Pellegrin, Sébastopol, sa concubine Marie Nicole Sarah Botte alias Medze , 45 ans, le fils de cette dernière, Louis Andrian Dilane Botte, 11 ans, et Louis André Cyril Madone, 58 ans, habitant Camp Levieux ont été tués sur le coup.

Ils se trouvaient tous sur la banquette arrière. On déplore également trois blessés : Jean Dano Collette, 30 ans; Jordan Rabaye, 10 ans et John Rabaye, 3 ans. Le chauffeur, Louis Jean-Noël Bergue, lui, a été gravement blessé au visage. À ses côtés se trouvait Marie Sharon Sonia Dubion, 27 ans. Tous habitent Pellegrin, Sébastopol.

La veille, Louis Jean-Noël Bergue s'était rendu chez son cousin Berthy Yan Kan Yun, un tôlier de Sébastopol pour lui emprunter sa voiture, une Toyota blanche. Il avait indiqué à son cousin qu'il devait récupérer son portable chez un ami. En fait, il avait planifié de se rendre à un anniversaire chez un proche à Médine Camp-de-Masque, avec huit autres invités.

Vers 23 heures, après la fête, les neuf occupants de la voiture rentrent chez eux. À hauteur de la route de Bel-Étang, après la jonction de Petit-Paquet en direction de Sébastopol, la voiture devait tomber en panne. les occupants décident de la pousser pour la faire démarrer.

Hélas, ils se trouvaient sur une côte. Les occupants décident de faire un "U turn" pour remettre la voiture dans la direction inverse, vers Médine Camp-de-Masque, pour pousser plus aisément la voiture sur la pente. Malgré tous leurs efforts, la voiture ne redémarre pas. Ne pouvant plus rien faire, le chauffeur décide de garer le véhicule sur le bord de la route, et d'attendre le lever du jour pour chercher de l'aide.

Tous les occupants de la voiture dormaient à poings fermés lorsque, vers les 5h40, les passagers qui ont survécu au drame entendent un vacarme assourdissant.

La police est vite mandée sur les lieux. Les survivants sont transportés d'urgence à l'hôpital de Flacq. Les corps des quatre malheureuses victimes seront transportés à la morgue de l'hôpital de Candos.

Le rapport d'autopsie du Dr Sudesh Kumar Gungadin, chef du service médico-légal, assisté des Drs Chamane et Parsad-Jankee, a attribué le décès de Louis Michael Phillipe et Marie Nicole Sarah Botte à un choc dû à de multiples blessures. La mort de Louis Andrian Dilane Botte est attribuée à une rupture du foie, alors que Louis André Cyril Madone est décédé d'une fracture du crâne.

L'assistant surintendant de police (ASP) Armoogum et le surintendant (SP) Dawoonarain, responsables de cette division de la Western Division, ont mobilisé leurs hommes pour veiller au bon déroulement de l'autopsie et à la restitution des corps aux familles endeuillées.

Le chauffeur du camion a subi un éthylotest qui s'est avéré positif. Bhajansing Beeharry était bien sous l'influence de l'alcool au moment de l'accident. Son taux d'alcoolémie était de 34 microgrammes (mg). Un prélèvement sanguin a été effectué pour des analyses approfondies pour déterminer précisément son taux d'alcoolémie.

L'autre conducteur, Louis Jean-Noël Bergue, blessé dans l'accident et portant une minerve, n'a pu souffler dans l'appareil d'éthylotest. La police a réclamé une prise de sang pour effectuer des analyses.

Bhajansing Beeharry a comparu devant le tribunal de Flacq. Il a été inculpé provisoirement d'homicide involontaire par imprudence. La police a objecté à sa remise en liberté sous caution. Il devra participer à une reconstitution des faits sur le lieu du drame. L'enquête est menée par la police de Montagne-Blanche sous la supervision des chefs inspecteurs Moosbally et Bansoodeb.

Les rescapés racontent

"Mo ine tanne tappé", se rappelle Jean Gariot Collette, 30 ans. Toujours sous le choc, il revient péniblement sur l'accident tragique qui a ôté la vie à ses amis. Ce père de famille, maçon de son état, indique qu'il revenait de chez un ami à Médine Camp-de-Masque. Il était 23 heures.

«La voiture est tombée en panne d'essence. Nous avons tenté de la pousser pour la faire démarrer, mais en vain. Nous avions donc décidé de passer la nuit à bord, en attendant le lever du soleil. Mo ine tanne tappé. Mo fine perdi connaissance. Mo fine ouvert lizié dans l’hôpital», relate-t-il.

La concubine du conducteur, Marie Sharon Sonia Dubion, 27 ans, donne sa version des faits. «Je me trouvais sur le siège passager. Quand le camion a violemment heurté la voiture, je me suis évanouie. J'ai été blessée au front. Mes fils, âgés de 10 et 3 ans, ont subi des blessures légères.»

Le cinquième rescapé, Jean-Noël Bergue, un maçon de 46 ans, reste alité à l'hôpital. Il a été gravement blessé au visage et n'arrive plus à s'exprimer. Les policiers n'ont pu prendre sa déclaration. «Je ne savais pas du tout où mon frère était parti. Il effectuait régulièrement des courses pour les gens de la localité et empruntait souvent des voitures pour ce faire», relate son frère. Jean-Noël Bergue devait par la suite être transféré à l'hôpital des yeux à Moka. Il peinait à ouvrir les yeux qui ont été affectés par des débris de verre.

Choquée par la disparition de sa nièce, elle reste hospitalisée

La tante de Sarah Nicole Marie Botte, 61 ans, est sous le choc. Elle n'arrive toujours pas à admettre la disparition tragique de sa nièce bien-aimée. Elle s'est évanouie devant la morgue de l'hôpital Victoria, après avoir vu le cadavre de sa nièce. La dame a été hospitalisée, vu qu'elle avait un problème de santé.

La fille de Nicole croyait sa mère à l'hôpital

Dans une déclaration au Défi Quotidien, la fille de Nicole a confié qu'elle a cru que sa mère s'est rendue à l'hôpital de Flacq, car elle souffrait d'asthme. Ce n'est que mardi matin qu'elle a appris que sa mère a été victime

d'un accident.

Le chauffeur du camion : « La voiture a surgi subitement d'un champ »

Bhajansing Beeharry a été longuement entendu par les policiers. Il a avoué aux enquêteurs avoir bu trois rhums la veille. Ce qui explique les 34 mg d'alcool qu'il avait dans le sang. L'habitant de Sébastopol, en présence de son avocat, Me Vikash Rampoortab, a assuré avoir «tout fait pour éviter la collision. Vers cinq heures, je me suis rendu à Melrose pour prendre mon camion.

Je suis employé par un entrepreneur et je suis chargé de transporter des travailleurs sur les chantiers ou dans les plantations. Je me dirigeais vers Bramsthan pour récupérer des ouvriers. Je roulais à la vitesse de 60 km/h. À hauteur de Bel-Étang, j'ai aperçu la voiture qui a surgi subitement d'un champ de canne pour tourner à droite. J'étais à dix mètres de la voiture», assure-t-il. «Le feu arrière de la voiture n'était pas allumé, et la route n'était pas éclairée. J'ai tout fait pour l'esquiver», a insisté le camion­-neur. Ce qui intrigue le plus les enquê­teurs, c'est qu'il n'y a aucune marque de freinage sur le lieu de l'accident.

« Mon beau-père a des remords de conscience»

Sollicité pour une déclaration, le gendre de Bhajansing Beeharry nous a confié que son beau-père regrette vivement ce drame qui a plongé les familles des quatre victimes dans le deuil. «So conscience pe reproche li. Li pe envi faire kitsoz pou ça ban fami ki fin perdi zot membres», indique son gendre, âgé de 40 ans. Les proches du chauffeur l'ont rencontré au poste de police. Ils se disent très affligés par ce terrible drame. «Bhajansing avait l'habitude de prendre quelques verres le soir, mais il est toujours à jeun quand il prend son volant le matin», conclut son gendre.

Berthy Yan Kan Yun, propriétaire de la voiture : « J'ai l'habitude de prêter ma voiture à Jean-Noël »

Ce tôlier de 30 ans était loin de s'imaginer qu'il allait perdre la voiture qu'il venait d'acheter en décembre dernier. Il était 20h30 quand Louis Jean-Noël Bergue s'est rendu au domicile de son cousin. Berthy Yan Kan Yun dormait quand il est venu lui emprunter sa voiture.

«Mon cousin m'a raconté qu'il avait oublié son téléphone portable chez un ami et qu'il devait le récupérer. Je lui ai donné la clé de la voiture et il est parti. Je me suis rendormi. À mon réveil, j'ai constaté que ma voiture n'était pas dans le garage. J'ai tout suite appelé Jean-Noël, mais il ne répondait pas à mes appels», explique-t-il.

Berthy Yan Kan Yun devait alors appeler l'épouse de Jean-Noël. Cette dernière devait l'informer que son époux n'était pas rentré de la nuit. Une quinzaine de minutes passent. Une personne vient alors informer Berthy Yan Kan Yun que sa voiture a été accidentée. «Il a vu une affiche 'à vendre' sur ma voiture. Cet individu a composé mon numéro de portable pour m'informer du drame. Depuis que je l'ai acquise, Jean-Noël avait pris l'habitude de me l'emprunter. Je n'ai jamais eu de problème auparavant», explique le tôlier.