Rapport confidentiel – Un gouffre financier nommé State Trading Company Mauritius

il y a 13 années, 4 mois - 27 Juin 2011
Rapport confidentiel – Un gouffre financier nommé State Trading Company Mauritius
Des pratiques très douteuses et des transactions louches ont eu lieu. C’est ce que révèle le rapport ultra-confidentiel d’Insight Forensics Ltd, livré en février dernier, dont Le Défi Quotidien a pu se procurer une copie.

Cette compagnie a épluché, pour le compte de la nouvelle direction de l’organisme, les contrats liant la STC à Betamax, Mangalore Refinery & Petrochemicals Ltd (MRPL) et la création de State Trading Company Mauritius Ltd (STCM), entre autres. À ce jour, le gouvernement n’a initié aucune poursuite. Nous publions aujourd’hui une première partie du rapport.

Le 5 septembre 2007, le Board de la STC dit oui à la création de la STCM, une compagnie privée, pour faire de « l’importation et de l’exportation ». Ranjitsingh Soomarooah, alors directeur de la STC, est nommé directeur exécutif de la compagnie, et perçoit un salaire de Rs 45 000 à ce titre. Les directeurs non-exécutifs sont quatre membres du Board de la STC, dont Ah Fat Lan Hing Choy (trésorier du Parti Travailliste et actuellement Senior Advisor au Bureau du PM). 

Pour les rédacteurs du rapport, la création de cette compagnie est un « 'colourable device' utilisé afin de ne pas présenter des amendements à la loi existante sur les appels d’offres. Ils notent aussi que le ministre de l’Industrie et du Commerce de l’époque n’a pas porté l’affaire au Conseil des ministres. 

Le but était de se débarrasser des procédures d’appel d’offres. Pour pouvoir commencer ses opérations, la STC lui accorde un emprunt de Rs 50M sans intérêt. 

La principale transaction faite par STCM a trait à l’achat de gros pois de Madagascar. Elle représente 40% de la totalité des opérations de l’entreprise. Plusieurs anomalies de taille sont constatées. Le Board de la STC note, le 27 septembre 2007, que toutes les dépenses faites pour cet achat le seront sur le compte de STCM. Or, pour les deux contrats entre STCM et TAMI, entreprise qui devait livrer les gros pois, c’est la STC qui a fini par débourser plus de Rs 6M.

Une fois livrée, la cargaison de 600 tonnes s’avère être de « qualité pas satisfaisante ». Si dans un premier temps, STCM exige le remboursement de la somme payée à TAMI, soit 105 000 euros (environ Rs 4M), le 15 juillet 2010, STCM décide de laisser tomber sa réclamation. Malgré cela, STCM financera l’achat de 50 tonnes de semences de gros pois au coût de 50 000 euros (Rs 2M) auprès de la même entreprise et s’engage contractuellement à acheter la totalité de la récolte provenant de ces 50 tonnes en 2008.

Selon le contrat, "STCM Ltd fera venir une équipe qui sera chargée de représenter STCM Ltd, de suivre les opérations d’achat des semences et de régler les acomptes". En fait, personne n’a inspecté les semences.

Mais il y a pire. Insight Forensic Ltd indique que « malgré nos nombreuses requêtes, nous n’avons pas pu obtenir des preuves que ces semences ont effectivement été achetées ». Il dénonce aussi un manque de transparence flagrant dans les transactions financières avec TAMI.

En 2007, une machine d’emballage est achetée. De nombreux manquements sont découverts par rapport à cette transaction qui a coûté plus de Rs 2M. De plus, la machine est arrivée de Chine avec plus de sept mois de retard et n’a pu être utilisée par STCM.

Le 13 octobre 2009, STCM décide d’acheter du sucre. Le 26 novembre, elle donne son approbation pour acheter 25 000 m2 de sucre blanc du Brésil pour vendre à une compagnie indienne. Pour que cette opération puisse se faire, la STC prend Rs 7 923 421 de ses comptes pour donner à STCM. De l’argent gaspillé, parce que la compagnie brésilienne ne pourra honorer son contrat. La STCM ne récupérera pas la garantie qu’avait placée cette entreprise du Brésil puisque son compte « n’était pas opérationnel ». Cela n’empêchera pas STCM d’effectuer un autre achat auprès de cette même entreprise le 29 janvier. Et une nouvelle fois, elle n’honorera pas son contrat. Encore de l’argent perdu pour STCM.

Avec l’entrée du MSM dans le gouvernement en mai 2010, décision est prise de faire cesser les opérations de STCM. Chose faite le 1er juin. STCM a fait perdre plus de Rs 40M à la STC.

STCM a, pour sa part, éliminé des dettes que d’autres compagnies lui devaient pour un montant de Rs 23 470 460. Parmi Rs 2,2M que lui devait Millenium Challenge, une entreprise avec laquelle STCM « n’avait aucune trading activity ».