Sorèze - Virage De La Mort : Les Bus Sur les Châssis de Camions en Question

L'accident meurtrier, faisant dix morts et 44 blessés au virage de la mort à Sorèze, vendredi matin impliquant un autobus Blue Line de la Corporation National de Transport (CNT) est venu remettre en question la qualité et la sécurité des autobus sur les routes.

Cette question a été évoquée lors des délibérations du Conseil des ministres de vendredi matin. D'autre part, la succession de catastrophes avec pertes humaines, soit 11 lors des inondations meurtrières à Port-Louis le samedi 30 mars et dix victimes d'accident de la route le vendredi 3 mai, ne laisse pas les autorités insensibles. Entre-temps, dans la journée d'hier, des experts ont procédé à un examen minutieux des pièces essentielles de l'autobus accidenté en vue de déterminer les causes de ce dramatique accident de la route.

Des recoupements d'informations effectués par Week-End auprès des sources ministérielles autorisées indiquent que la qualité des autobus importés dans le domaine du transport en commun est remise en cause. En effet, les spécialistes s'accordent à dire que la majorité des autobus opérationnels ont été montés sur des châssis de camion, donc formule inadaptée en matière de sécurité pour les usagers. Le vice-Premier ministre et ministre de l'Infrastructure publique, Anil Bachoo, responsable du transport en commun et de la CNT, devait être en présence d'instructions en vue de revoir toute cette politique et de n'autoriser que des bus montés sur des châssis de bus.

Seuls les Low Flat Buses importés récemment par la United Bus Service (UBS) sont considérés comme des "safer vehicles for public transport".  Le ministère de l'Infrastructure publique devra ouvrir des consultations avec les Finances en vue d'élaborer un Package of Incentives pour intéresser les compagnies de transport en commun de faire l'acquisition de ces Low Fat Buses. L'une des options évoquées touche à une révision des taxes douanières à l'importation de ces bus.

D'ailleurs, lors de son point de presse de vendredi après-midi au sujet de l'accident de Sorèze, le Premier ministre, Navin Ramgoolam, a effleuré cette problématique de bus sur des châssis de camion. "MPI ine fer bis vin dépi Japon, pli modern", a-t-il déclaré à une question de la presse.

D'autre part, le commentaire prononcé en haut lieu à l'Hotel du gouvernement à peine une heure après l'accident dramatique du vendredi 3 mai, notamment "kombié zafer kumsa pou aksepté ankor", continue à hanter les autorités. Et en particulier un ministère, qui se trouve dans l'œil du cyclone de tous les dangers depuis ces derniers temps. Mais aucune des sources ministérielles, contactée par Week-End, n'a voulu s'aventurer pour confirmer l'identité de l'auteur de cette remarque au vitriol ou encore le destinataire de ce missile.

Dans la conjoncture, force est de constater que la gestion de la CNT et l'entretien de la flotte d'autobus sont aussi passés à la loupe. Ainsi, les chiffres révélés officiellement par le vice-Premier ministre, Anil Bachoo, à l'Assemblée nationale  au sujet du nombre d'accidents impliquant des autobus de la CNT, reviennent aux devants de l'actualité.

De 2004 à juin 2011, la situation à la CNT a enregistré une nette détérioration comme suit:

2004/2005: 593 accidents

2005/2006: 633 accidents

2006/2007: 619 accidents

2007/2008: 832 accidents

2008/2009: 747 accidents

2009/2010: 649 accidents

Jan à juin 2011: 609 accidents.

Depuis vendredi dernier, des experts du ministère de l'Infrastructure publique et un Senior Adviser du gouvernement sont impatients de conclure l'examen de l'autobus accidenté en vue de déterminer les causes de l'accident. Mais cet exercice doit se dérouler selon des procédures établies en présence des experts du Forensic Science Laboratory (FSC) et de la police.

Pendant toute la journée d'hier, les experts ont décortiqué toute la mécanique de l'autobus, qui a été remorqué jusqu'au poste de police du Bulk Sugar Terminal (BST). Les cylindres, le cerveau et les boosters de l'autobus de la CNT ont été démontés et ont subi des analyses approfondies en vue d'élucider les raisons pour lesquelles les freins de sécurité n'ont pas fonctionné dans les circonstances.

En début de soirée d'hier, très peu d'informations ont filtré quant aux causes exactes de cet accident ayant fauché la vie à dix personnes. Les indications sont que cette contre-expertise de l'autobus devra être complétée ce week-end avec le rapport signé du FSL versé dans le dossier de l'enquête de la police dans les meilleurs délais.

Face à la presse, vendredi, Navin Ramgoolam a fait ressortir que "seki nou ine appran se ki li en bis Ashok Leyland ki ena en dual system. Li ena enn system ki aparaman donne en alarme ki blok moter la mem. Donc, nou bizin konné ki ine arrivé". Il a laissé entendre qu'il est déjà en présence des observations préliminaires.

"Sa bis-là siposé éna enn dual system. Li ena ène system d'alarm à l'intérieur. Dapré bann eksper pe dire la, dan premye rapor ki la roue la ti pe kontinyé tourné par derrier ki montré pa tou system kin ine fail. Zotte pa konné. Zot oulé guetter avec detay", a ajouté le Premier ministre, qui n'a pas voulu s'aventurer sur des éventuelles sanctions à la confirmation de la mise en cause de l'autobus dans cet accident.

"Il y a plusieurs versions. Bizin konné kot fot là été lerla nou pou kapav dir", devait-il faire comprendre à la presse. Il s'est évertué à justifier sa décision de ne pas s'arrêter sur les lieux de l'accident à Sorèze, vendredi matin, alors que le cortège premierministériel descendait vers Port-Louis.

Mais d'autres sources persistent à croire qu'une partie des circonstances de ce troisième grave accident de la route dans le virage de Sorèze depuis 2009, avec seize morts en tout, se trouve dans la conception de ce tronçon de La Nationale.

La controverse se poursuivra...