Mais, déjà, les auditions de la semaine dernière laissent entrevoir une faille importante dans le système d’entretien des Bluelines.
«Lorsqu’il s’agit de vies humaines, chaque étape est importante et les personnes concernées doivent recevoir les formations nécessaires», a témoigné Zaid Kodabuckus, Principal Mechanical Engineer au ministère des Infrastructures publiques, qui a été entendu le jeudi 10 juillet. Gopeechand Gaya, Chief Mechanical Engineer à la CNT a, lui aussi, soutenu, vendredi, que les mécaniciens et les superviseurs ne travaillent pas comme ils sont censés le faire. Son audition se poursuit du reste ce lundi.
L’audition des mécaniciens de la Compagnie nationale de transport (CNT) étayent bien ses propos : Aslambye Heetun et Pradeep Kumar Beekhy, qui ont travaillé en binôme sur l’autobus accidenté, ont démontré qu’ils ignoraient qu’il fallait utiliser une solution savonneuse pour vérifier des fuites d’air sur le système de freinage. Cette technique est pourtant soulignée dans le manuel d’entretien du bus.
Ainsi, les deux employés postés au «dépôt» de La Tour Koenig ont expliqué avoir décelé une fuite dans le système de freinage du bus accidenté en prêtant l’oreille et en tâtant les tuyaux et autres pièces. L’utilisation d’une eau savonneuse aurait été une méthode plus sûre pour détecter la fuite, ont-ils admis.
Ils ont aussi avoué que leur dernière formation pour les Ashok Leyland remonte à 1995. Elle visait surtout les ingénieurs, les superviseurs et une partie des mécaniciens. En outre, les deux témoins ont expliqué que les Bluelines sont différents des autres bus de la CNT : ils sont dotés d’un système de freinage équipé de «ballons d’air», contrairement aux bus normaux.
Par ailleurs, il ressort que la CNT n’a pas modifié le mode d’opération de ses mécaniciens et des superviseurs depuis l’accident de Sorèze, qui a fait dix morts et une quarantaine de blessés. Aucune nouvelle formation n’a été offerte aux mécaniciens, superviseurs, ou ingénieurs depuis ce drame.
Zaid Kodabuckus a de son côté déploré un manque de contrôle et de professionnalisme de la part des mécaniciens et de leurs supérieurs. Selon lui, trop de réparations sont faites à la «va-vite» et sans vérifications.
«J’ai été choqué de constater que l’Exhaust Break, un système de freinage actionné par l’évacuation de l’air de l’échappement, avait été supprimé sur l’autobus accidenté», a-t-il témoigné devant la cour. Le Blueline est, contrairement aux bus «normaux», doté de plusieurs systèmes de freinage afin de garantir plus de sécurité. Zaid Kodabuckus estime que si l’Exhaust Break «avait été opérationnel, les dégâts auraient probablement été limités».
L’ingénieur poursuit en indiquant que l’alarme d’avertissement, présente dans tous les autobusBlueline, n’était pas connectée. «Cette alarme avertit le conducteur s’il y a un problème mécanique dans le véhicule, mais celle-ci n’était pas activée au moment de l’accident. Elle n’était pas reliée à l’autobus», explique-t-il. Il souligne que tout cela aurait dû être vérifié lors du «general servicing» effectué sur l’autobus accidenté en février 2013, soit deux mois avant le drame.
Selon Zaid Kodabuckus, l’accident a été provoqué par des freins défectueux. Il devait aussi faire mention du manque de connaissances des mécaniciens qui ont effectué l’entretien. Il indique que le «divider ou quadriple valve kit», qui assure la sécurité des systèmes de freinage de l’autobus, ainsi que le tuyau reliant tout le système à la porte principale de l’autobus, avaient été vérifiés. Or, dit-il, le kit n’a pas fonctionné lors de la rupture du tuyau : «lors de la fuite d’air, le kit de sécurité n’a pas fonctionné comme cela aurait dû être le cas s’il était bel et bien opérationnel.» Et d’ajouter que «seule la porte aurait dû être bloquée, et non pas tout le système.»