Accident à Wooton: 4x4 «fou», policiers, victime et polémique

4 years, 3 months ago - 2 December 2019, lexpress.mu
Accident à Wooton: 4x4 «fou», policiers, victime et polémique
Il est 13 h 00. Le soleil brille de mille feux à Wooton. Toutefois, ceux présents à la station-service d’Indian Oil ont du mal à le voir.

Le véhicule a balayé sur son passage Rohit Gobin et Daniel Lamarque.

La nouvelle de la mort de Rohit lui font revivre cette incroyable scène à laquelle elle a assisté. Les images ne cessent de défiler dans sa tête. Le fait d'imaginer que ça aurait pu être elle glace le sang de la pompiste. La tristesse se lit sur son visage et elle se renferme dans un mutisme, refuse d'en dire davantage. «C'est un cauchemar...»

Ce qui agace Sunjiv Jaunkee c'est la manière avec laquelle ont agi les policiers. «Après être sortis du 4x4, ils sont allés à l'arrière de la station sans même jeter un coup d'oeil sur Rohit. Par la suite, une voiture noire blindée est venue les récupérer. Je leur ai dit de rester pour faire l'alcootest ici mais ils n'ont pas voulu...» Selon lui, les circonstances de cet accident demeurent floues. Il assure, dit-il, qu'il fera tout pour que justice soit faite afin de rendre hommage à ce «bosseur, honnête et humble» qu'était son employé. «Fer 8 mwa li travay-la et zamé monn gagn kit problem ar li. Li ti extra korek et bann klian habituels oussi ti bien kontan li

Chez les Gobin, c'est la dévastation. Leur «pilier» s'est écroulé. Au lieu de fêter un anniversaire vendredi, il y a eu des funérailles en leur demeure, à Bois–Chéri. Jashley, 21 ans, n'arrive pas à se remettre de ses émotions. C'est lorsqu'il priait de tout son coeur pour la guérison de son papa, que la nouvelle de la mort de ce dernier est tombée, jeudi. «Sa moman-la nou ti pe bizin pé préparé pou laniverser mo ti ser ki ti pe gagn 18 ans mé non nou ti dan langwass ek pir la inn arivé» confie ce jeune homme meurtri par la douleur.

Même si Rohit était sous respiration artificielle à cause de ses graves blessures, sa famille espérait vraiment le revoir sur pied. Jashley est lui aussi en colère après ce qui est arrivé à son papa. Il estime aussi que cet accident «n'est pas normal». «Pourquoi est-ce que les deux policiers ont quitté les lieux alors que le corps de mon père y était toujours ? Pourquoi les circonstances de cet accident demeurent floues ? Il faut que justice soit faite. Mon père ne méritait pas de mourir ainsi. Nous n'allons pas lâcher l'affaire tant que nous ne comprendrons ce qui s'est passé !»

Le policier...

Les insultes, les interrogations, les thèses pleuvent sur les réseaux sociaux depuis cet accident aussi tragique de spectaculaire. Si ces collègues sont pris à partie, celui qui subit les foudres des Mauriciens, c'est le chauffeur du 4x4. Le nom du policier qui conduisait le véhicule : Ashfaar Domun... Ce dernier a comparu en cour vendredi.

Le fait que le 4x4 ait été transformé en amas de tôle témoigne de la violence de l'impact. Questions dès lors ? Comment pourquoi ? D'aucuns se demandent si le policier était sous l'influence de quelque substance illicite, même si l'alcootest s'est révélé négatif.

En tout cas, pour son entourage, les «sous-entendus» sur son «état» lors des faits n'ont pas lieu d'être. Ashfaar Domun, est connu comme une per-sonne calme et joviale, dit-on, qui n'a pas pour habitude de consommer des drogues et autres substances prohibées. «Li enn garson respektab. Li pa bwar. Li pa fumé. Li pa dan okenn larout. Sa mo kapav garanti ou...»

L'habitant de Camp Fouquereau a rejoint les forces de l'ordre en 2010. Il a commencé sa carrière au poste de police de Vacoas avant d'être posté à la Traffic Branch de Curepipe pour ensuite atterrir au poste de police de Pailles. Il a ensuite rejoint le poste de police d'Eau-Coulée il y a environ un an.

Marié, Ashfaar Domun est père d'un petit garçon d'un an et demi. Selon ses proches, l'accident s'est produit alors qu'il tentait de changer de voie sur l'autoroute à hauteur de Wooton. «Li finn zis dir nou ki sa finn arivé kan li ti sanz lane. Van la inn derapé ek linn al lor filling la.»

S'agit-il d'un problème mécanique dans ce cas ? D'un problème au niveau de la route ? Qu'advienvdra-t-il du policier et de son collègue dorénavant ? Seront-ils suspendus ? Contacté à ce propos, l'inspecteur Shiva Coothen, responsable de la cellule de communication de la police dit affirme qu'il n'a aucun détail à ce sujet. «Mo pena okenn repons pou donné, lanket pe fer.»

Le cas de l'autre victime

Daniel Lamarque, qui a lui aussi été fauché par le 4x4 «fou», l'a échappé belle. Également âgé de 58 ans comme son collègue décédé – le pompiste se remet tout doucement de ses blessures, dont de nombreuses fractures, dans une clinique privée. Cet habitant d'Eau-Coulée a été le premier à être percuté par le 4x4 de la police.

Accident à Wooton: le suspect participe à une reconstitution des faits

Il était au Volant de véhicule de la police impliqué dans l’accident fatal qui a eu lieu à la station-service de Wooton mardi 26 novembre dernier. Le policer Ashfaar Doomun, qui a été arrêté, a participé à une reconstitution des faits sur les lieux du drame ce vendredi 29 novembre.

Pour rappel, le véhicule conduit par le suspect a fini sa course contre une pompe à essence, blessant mortellement Rohit Gobin, un pompiste qui était en service.


Accident mortel à Wooton: «Je ne pourrai jamais chasser ces images de ma tête», dit le fils du pompiste

Proches, amis, et collègues se sont fait un devoir de rendre un dernier hommage à Rohit Gobin, lors de ses funérailles qui ont eu lieu, hier. Le pompiste de 58 ans, habitant de Bois-Chéri, n’a pas survécu à ses blessures. Percuté mardi matin sur son lieu de travail, à la station-service Indian Oil de Wooton, par un véhicule de la police d’Eau-Coulée conduite par le constable Ashfaar Domun, il a rendu l’âme jeudi après-midi.

L’émotion était à son comble. Jashley Gobin, 29 ans, avait tant prié pour que son père puisse s’en sortir. Mais le destin en a voulu autrement. Et les funérailles de son père ont eu lieu justement le jour où sa sœur devait célébrer ses 18 ans. Il se dit à présent déterminé à se battre afin de faire la lumière sur cet accident. «La vérité doit triompher et justice doit être rendue à mon père», confie-t-il.

Il dit avoir encore en tête les images de la caméra de la stationservice qu’il a visionnées. «Je ne pourrai jamais chasser ces images de ma tête. On peut voir la violence avec laquelle il a été percuté. Il court pour essayer de s’échapper. Il se retourne à nouveau mais il n’a pas le temps de courir. La fourgonnette le percute», raconte Jashley Gobin. Les trois élus de la circonscription n°13 (Souillac–Rivière-des-Anguilles), les ministres Kailesh Jagutpal et Renganaden Padayachy ainsi que le PPS Ismaël Rawoo ont rendu une visite à la famille endeuillée, jeudi après le décès du pompiste.

«Mo ankor pé gagn douler», confie le pompiste rescapé

Le collègue de Rohit Gobin, Daniel Lamarque, 58 ans et habitant d’Eau-Coulée, qui a aussi été renversé par le véhicule de police, est toujours admis en clinique. Il a subi plusieurs fractures et il se remet lentement de ses blessures. Contacté au téléphone, hier matin, il dit qu’il souffre toujours. «Mo ankor pé gagn douler. Dan enn-dé zour parla kapav mo pou sorti», a-t-il confié. Son état de santé ne lui a pas permis d’assister aux funérailles de son collègue. Il n’a pas souhaité faire d’autres commentaires.

«Je roulais à environ 100 km/h et j’ai dérapé suite aux accumulations d’eau», a dit le constable Domun

Le constable Ashfaar Domun, 31 ans, a été interrogé par la Criminal Investigation Division de Curepipe. Il a expliqué qu’il se trouvait sur la «fast lane» à Wooton et roulait en direction de Curepipe à environ 100 km/h lorsque le véhicule a dérapé à cause de la route glissante après les grosses averses et les accumulations d’eau. Il a participé à une reconstitution des faits hier après-midi avant de comparaître en cour pour homicide involontaire. Il a été reconduit en cellule policière. L’alcotest qu’il avait subi après l’accident s’est révélé négatif. L’enquête est placée sous la supervision de l’assistant surintendant de police Omrawoo et du surintendant de police Ruhomah. Son coéquipier, le constable Madhina, qui se trouvait dans le véhicule au moment de l’accident, a également participé à la reconstitution des faits. Il dit ne se souvenir de rien. Un rapport à la suite des plaintes du public que des policiers n’ont pas donné assistance aux pompistes grièvement blessés a été soumis au commissaire de police, Mario Nobin. 

Le fils de Rohit Gobin a déploré, lorsqu’il a visionné les caméras, qu’après l’accident, les policiers se sont rendus à l’arrière de la station-service. Une voiture privée, conduite par un sergent de police accompagné d’un constable, est venue récupérer les deux policiers pour les évacuer et ces derniers n’ont pas porté secours aux deux pompistes. La voiture appartient à une Woman Chief Inspector, qui l’a prêtée lorsqu’elle a appris que les policiers ont eu un accident. 

Mario Nobin a rencontré la Woman Chief Inspector ainsi que l’assistant commissaire de police Rassen, Divisional Commander Central, jeudi. Un haut gradé nous explique qu’une ambulance était déjà en route pour évacuer les deux pompistes qui nécessitaient des soins des professionnels de santé. Notre source relate que les policiers, qui étaient blessés, devaient aussi recevoir des soins. 

Selon nos informations, les policiers transportaient des provisions et se rendaient au poste de police d’Eau-Coulée dans le cadre d’une marche pacifique pour commémorer la Journée internationale de l’élimination de la violence à l’égard des femmes lorsque l’accident s’est produit. Cette marche a eu lieu devant l’église Ste-Hélène, à 9 h 15 mardi, pour prendre fin devant le poste de police. Aucune entrée n’avait été consignée quand les policiers sont partis pour cette sortie dite «unofficial trip» dans le jargon policier.

Le mardi fatidique

9h30: La chef hiérarchique du constable Domun se rend compte qu’il manque des rafraîchissements pour les participants venus à la marche pacifique commémorant la Journée internationale de l’élimination de la violence à l’égard des femmes. Elle lui demande d’aller chercher des gâteaux. Son collègue, le constable Madhina, l’accompagne.

9h45: Début de la marche.

10h47: La fourgonnette dérape à Wooton et percute les deux pompistes qui étaient à leur poste.

11h00: Arrivée du sergent de police et de son collègue à bord de la voiture d’une Woman Chief Inspector et d’autres unités de la police.

11h30:  Arrivée de l’ambulance pour transporter les pompistes à l’hôpital Jawaharlal Nehru, à Rose-Belle, notamment.