
Deux agressions en une seule journée, et une troisième le jeudi suivant. Pour Poomendra Letchana, Workers’ Director de la Compagnie nationale de Transport (CNT), la coupe est pleine. Les violences ciblant les travailleurs du transport se multiplient et la situation, déjà préoccupante, devient intenable. «Ce n’est pas la première fois que nos employés sont malmenés pendant leurs heures de travail, mais là, c’est la goutte d’eau de trop», assène-t-il. Il affirme attendre que le ministre du Transport, Osman Mahomed, intervienne rapidement pour protéger les employés, dont les conditions de travail se dégradent dangereusement.
Les derniers incidents illustrent la tension grandissante : deux employés ont été blessés, et dans un autre cas, c’est le bus lui-même qui a été endommagé. «La frayeur reste la même, peu importe la ligne où nous travaillons. On ne peut pas effectuer notre service avec la boule au ventre. On quitte la maison sans savoir ce que nous réserve la journée. Cela empire jour après jour», alerte Poomendra Letchana. Les agressions seraient liées, dans ces cas précis, au fait que les chauffeurs auraient laissé descendre des passagers hors des bus stops. Une pratique courante, qui suffit désormais à déclencher des attaques.
Face à ces dérives, le Workers’ Director exhorte Osman Mahomed à proposer des mesures fermes contre ceux qui menacent la sécurité des travailleurs et des voyageurs. «Il y avait une loi qui stipulait que toute personne agressant un employé du transport risquait l’arrestation et une amende. Mais où est-elle aujourd’hui ?» interroge-t-il. L’absence d’application de cette disposition donne, selon lui, le sentiment que les employés sont laissés à eux-mêmes.
Cette situation crée un climat d’une telle insécurité que certains travailleurs envisagent désormais de se défendre par leurs propres moyens. «Nous ne voulons pas en arriver là, mais comment faire ? On commence à travailler dès quatre heures du matin et on termine après 21 heures. Avec les fêtes qui approchent, ce sera encore plus tard. Nous ne sommes à l’abri de rien», craint Poomendra Letchana. Il admet que plusieurs employés lui ont confié envisager d’emporter des armes pour se protéger, une décision qu’il redoute mais qu’il comprend au vu de l’escalade des violences.
Au-delà des agressions physiques, d’autres situations illustrent les difficultés auxquelles font face les employés. Il cite notamment le cas récent d’un receveur suspendu pendant quatre jours après qu’un contrôleur a constaté qu’une passagère n’avait pas payé son ticket. «Le bus était plein à craquer, la dame changeait constamment de place. Le receveur n’a pas pu lui faire payer son ticket avant l’arrivée du contrôleur. Et c’est lui qui a été sanctionné»,raconte-t-il.Selon la loi, rappelle-t-il, un passager pris en flagrant délit de fraude doit payer le double du tarif. Une pénalité «complètement mise aux oubliettes », déplore-t-il, alors que l’employé, lui, a été sanctionné par un board.
La CNT dit attendre des actions concrètes pour garantir la sécurité de ceux qui assurent quotidiennement le service public de transport. Le ministre du Transport a été sollicité pour une réaction. Nous sommes en attente de son retour.