Un échantillon de 12 roches massives déjà dans l'île soeur.
Epierrage de 2 000 hectares de champs de canne à sucre.
La participation mauricienne dans la construction de la digue de Nouvelle Route du Littoral à La Réunion se précise. Un volume de 3,5 millions de tonnes de roches devrait sortir de nos terres, plus précisément de quelque 2 000 hectares de champs de canne, en attente d'épierrage, pour être acheminé vers l'île soeur. L'exportation de cette importante quantité de roches massives, nécessaires à l'avancement du chantier de la digue ne devrait pas se faire d'un seul coup et dans l'immédiat, mais sur une période de trois ans et cette opération pourrait bien démarrer à compter de quelques mois. C'est ce qu'a expliqué Michael Athow — président exécutif d'Aluminium Facade Engineering Ltd (AFEL), entreprise mauricienne qui a envisagé ce projet faramineux — à Week-End. Si le viaduc — long de 12 kilomètres et à plus de 20 mètres au-dessus de la mer – qui reliera Saint-Denis à La Possession est prête, en revanche, La Réunion a besoin de près de 9 millions de tonnes de roches pour compléter la digue de La Grande Chaloupe à La Possession. Avec l'absence d'autorisation de la Justice pour exploiter une carrière de roches pour la construction de cette digue, les travaux ont ralenti dans l'île, au grand désarroi des transporteurs (camionneurs). Et depuis, la route la plus chère de France, soit environ 2 milliards d'euros, n'a cessé d'alimenter les polémiques et articles de presse.
En avril dernier, Week-End évoquait en primeur la participation mauricienne dans ce projet gigantesque. Cependant, les démarches d'AFEL étant toujours en cours, à l'époque — menées conjointement avec son partenaire réunionnais, l'entrepreneur Dany Payet de Projet Interface — la compagnie mauricienne était peu encline à en dire davantage. A La Réunion, les révélations de Week-End ont titillé la curiosité de nos confrères et auraient même, nous rapporte une autre source, "fait quelque peu bousculer, voire avancer les choses", tandis que la NRL et les retards accusés dans les travaux sont plus que jamais d'actualité dans l'île. Il faut dire qu'en exportant des roches massives qui correspondent aux normes requises pour la construction de la digue, AFEL se positionne comme un partenaire providentiel. Mais il y a une semaine les autorités réunionnaises, rapportait la presse de l'île, se disaient ne pas être au courant de l'opération Réunion/Maurice pour l'importation des galets. "La Région assure qu'il ne lui appartient pas de prendre position quant à l'origine de l'approvisionnement des roches. La responsabilité incomberait au groupement en charge de la réalisation de la digue", peut-on lire sur le site en ligne de Linfo.re. De son côté, Michael Athow qui revient de La Réunion aujourd'hui, y a passé quelques jours cette semaine où il en a profité pour communiquer sur la participation mauricienne au projet du viaduc. Auparavant, il y a quelques semaines, Michael Athow et le Managing Director d'AFEL, Charles Sambadoo, avaient fait le déplacement à La Réunion lorsque les douze premières roches massives mauriciennes pesant de 500 kilos à 4 tonnes ont débarqué au port de l'île soeur. Après avoir été dédouanées, en présence d'un huissier, une carotte avait été prélevée à des fins d'analyses. Celles-ci nécessaires à la validation des roches mauriciennes. Mais le protocole phytosanitaire ayant été respecté à la lettre par la partie mauricienne, les roches devraient convenir au projet. A ce stade, les hommes d'affaires mauriciens sont confiants. Après presque quatre ans de démarches et de négociations, Michael Athow affirme : "Nous sommes prêts à fournir des roches massives à hauteur de 3 millions de tonnes au projet NRL."
Traitement à 70°c dans le bassin
d'Alteo pour les échantillons
Après avoir été enlevées des champs de canne et avant d'être mises en conteneur pour être acheminées à La Réunion, les douze roches massives ont été désinfectées dans le bassin réservé au traitement thermique des boutures de cannes à sucre, du groupe Alteo. Dans une vidéo de cette opération que Week-End a pu voir, les roches sont plongées dans une eau à environ 70°C afin d'éliminer les impuretés, et autres particules et insectes. Des arrangements spéciaux ont dû être faites pour ensuite transporter les roches dans un conteneur, lequel a lui aussi été désinfecté.
Des transporteurs réunionnais pas d'accord avec l'importation mauricienne
Les transporteurs réunionnais sont divisés sur la participation mauricienne au projet de construction de la digue de la Grande Chaloupe à La Possession. D'une part, il y a ceux qui se disent soulagés que les travaux pourront reprendre à un rythme normal et ce à leur avantage et, d'autre part, la Fédération Nationale des Transporteurs de La Réunion qui déplore les pertes économiques en faveur des Mauriciens. "Tout se joue autour de notre propre économie réunionnaise et on ne comprend pas pourquoi on prend l'argent de La Réunion pour l'emmener à Maurice alors que nous avons tout ici pour terminer la NRL", déclarait Jean-Gaël Rivière, le président de cette fédération dans la presse réunionnaise.
Michael Athow, d'AFEL : "La Région est au courant de notre proposition"
« A la livraison des 12 roches, nous avions un dossier
en béton »
l Comment est-ce que vous vous êtes retrouvé dans le projet de roches massives pour la construction de la digue de la NRL ?
– Aussitôt que j'ai pris connaissance des conditions et normes dans le communiqué émis en 2013 sur le projet du viaduc ! It was stated there that rocks could be imported. Mais aucune mention n'avait été faite sur les pays d'où ces roches devraient être importées. I believed in it since day one, I was aware of the requirements to be respected. J'ai vu une opportunité dans ce projet [ ] cela fait trente ans que je suis dans le secteur de la construction, j'ai travaillé sur d'importants chantiers dont la construction de la Banque de Maurice. J'ai donc été cherché un entrepreneur à la Réunion, Dany Payet. En janvier 2017, à la suite d'une réunion de présentation du projet au ministère de l'Agro-Industrie avec plusieurs parties, des représentants des autorités locales ainsi que la société Projet Interface, il a été décidé que le ministère chapeautant la Mauritius Cane Industry Authority allait nous soutenir jusqu'à l'exportation des roches. Mais comme la MCIA a accepté de faire l'intermédiaire entre les petits planteurs et AFEL, c'est cette autorité qui nous a encadrés jusqu'au bout de l'exportation des 12 premières roches [ ] Toutefois, c'est finalement le ministère du Commerce qui, en 2018, nous a donné officiellement l'opportunité de prélever et ensuite d'exporter les premiers échantillons de roches massives, en provenance d'un champ dans le Nord vers La Réunion. Je dois dire que les Réunionnais ont apprécié le fait que nous avions compris et respecté toutes les procédures phytosanitaires et que la traçabilité de notre opération est transparente. Nous avions envoyés les roches non sans la certification émanant du National Plant Protection Office. A la livraison des 12 roches, nous avions un dossier en béton. A ce jour, c'est la première fois que des roches massives de Maurice se trouvent en terres réunionnaises. Après quatre ans de démarches, nous sommes arrivés à un niveau où notre participation est désormais connue.
l A La Réunion, la Région dit ne pas être au courant de votre opération. Vos commentaires ?
– La Région est au courant de notre proposition par voie officielle, depuis le 22 décembre 2017. Et le groupement GTOI/SBTPC/Vinci Construction depuis le 12 février 2018. We must not mix politics and private projects whereby the issue for the importation of massive rocks from anywhere outside Réunion Island is already provided under a clause in the "cahier des charges" of NRL. J'ai des documents officiels le prouvant. Donc, même si la Région a été prévenue de notre projet, elle est en mesure de dire qu'elle n'est pas au courant tant que le groupement GTOI/STBTPC/Vinci Construction ne l'a pas l'informée.
l Par ailleurs la Fédération Nationale des Transporteurs de La Réunion s'est prononcée contre l'importation des roches de Maurice pour des raisons économiques !
– J'ai finalement compris qu'il y a un problème de communication avec les transporteurs réunionnais. Ces derniers pensent que si l'importation des roches massives mauriciennes est permise, le groupement NRL n'importera pas uniquement les 3, 5 millions de tonnes d'AFEL, mais la totalité des 9 millions de tonnes de roches nécessaires pour compléter les travaux. Avec l'appui de Projet Interface, nous avons commencé à clarifier les choses avec certains transporteurs. Même si La Réunion importe nos roches, il y aura du travail pour ces derniers.
l Quand comptez-vous expédier les prochaines roches à La Réunion ?
– Nous ne savons pas quand nous allons pouvoir expédier les prochaines roches. Tant que le groupement de la NRL ne nous donne pas des indications en quantité et en temps, je ne pourrai vous répondre. Mais, pour notre part, nous sommes prêts à livrer dans six à huit mois.
l Vous avez acheminé les premières roches par conteneur, ce sera pareil pour les autres ?
– Non. Elles seront transportées par des barges, précisément huit barges que je ferai venir de Singapour. Ces huit barges transporteront chacune
12 000 tonnes de roches, pesant d'une à cinq tonnes respectivement, chaque mois. Avec ce mode de transport, il ne sera pas nécessaire de désinfecter les roches comme nous l'avons fait pour les échantillons. L'eau de la mer s'en chargera.
l Ce projet implique des petits planteurs. Quelle est la superficie totale de champs de canne identifiée et quel est nombre de planteurs concernés ?
Nous avons ciblé 2 000 hectares, ce qui ne représente que 1 % de la surface de Maurice et 2 400 petits planteurs. A la fin du Field Operations Regrouping and Irrigation Project financé à l'époque par l'Union européenne, en 2015, l'épierrage ne se fait plus dans leurs champs. Les terres ne peuvent plus être cultivées. Désormais, ce projet entre dans le programme Small Planters Regrouping Project. AFEL procédera à l'épierrage des champs sur une durée allant de six à douze mois. Il n'est pas question de nous arrêter à l'épierrage. Nous procéderons selon un protocole, lequel comprend, entre autres, une étude du terrain. Nous ne toucherons pas aux drains naturels. Lorsque nous rendrons son champ épierré à un planteur, celui-ci le retrouvera en état d'être à nouveau cultivé et même avec des pousses de canne à sucre. Ceci dit, nous n'allons pas pouvoir exporter toutes les roches épierrées, mais seulement environ 30 %. 7 millions de tonnes de roches resteront sur le marché local.
l Les petits planteurs se disent en détresse, car actuellement ce sont 27 000 hectares de champs de canne qui sont à l'abandon
– En espérant que le projet de la NRL importe les roches massives mauriciennes extraites de leurs terres, AFEL gives the assurance that we will do the maximum to make most of their lands mechanically usable in order to reduce production cost for agriculture use. Et nous comptons sur leur collaboration pour opérer selon le protocole qui les lie de la MCIA.