Cour suprême : la NTA, un département public ne peut être poursuivie à son nom

1 year, 10 months ago - 6 December 2022, Le Mauricien
Cour suprême : la NTA, un département public ne peut être poursuivie à son nom
De nombreux opérateurs d’autobus individuels en seront pour leurs frais après qu’ils aient essayé de traîner en justice la National Transport Authority (NTA).

La juge Jugessur-Manna, siégeant en Cour suprême, a statué dans un jugement en date du 30 novembre que la NTA est un simple département du gouvernement, et non une Body Corporate (une entité avec une personnalité juridique indépendante), ce qui fait qu’elle ne peut être poursuivie en justice. Ce jugement prend à contre-pied un ou plusieurs autres jugements dans le passé, où il avait été retenu que la NTA était bel et bien une Body Corporate.

La Bus Owners Cooperative Society (North) Ltd est une coopérative qui coordonnait les opérations de ses membres, des opérateurs d’autobus individuels, sur la route 94 (de Rivière-du-Rempart à Saint-Antoine). Ces derniers opéraient sur cette route depuis 1989. En 1991, la NTA avait lancé un appel d’offres pour qu’il y ait davantage d’opérateurs sur cette route, malgré les objections de la Bus Owners Cooperative Society (North) Ltd, plaidant que cette route était déjà saturée.

Plus de 62 opérateurs d’autobus individuels, regroupés au sein de la Bus Owners Cooperative Society (North) Ltd, avaient alors entamé des poursuites contre la NTA, lui réclamant des dommages vu que, selon eux, cette entité avait déraisonnablement varié leur Public Service Vehicle License (Bus) pour permettre à une compagnie, Dveela Transport Ltd, d’avoir un monopole sur la route 94.

Toutefois, la juge Jugessur-Manna a statué dans un jugement que la NTA n’était pas une Body Corporate, contrairement au Mauritius Institute of Education, à la Mauritius Broadcasting Corporation ou encore la Mauritius Revenue Authority, où les lois qui mettent ces entités sur pied spécifient que ce sont des Body Corporates. Par contre, en ce qui concerne la NTA, la Road Traffic Act ne fait nullement mention qu’elle est un Body Corportate.

Il faut savoir qu’en droit, une Body Corporate est une entité qui acquiert une personnalité juridique, tout comme une personne, et a ses propres droits et responsabilités. Une compagnie privée est ainsi une Body Corporate, indépendamment de ses actionnaires, tout comme l’État. Ce qui permet à ces entités d’entrer une action en justice ou d’être poursuivies en justice.

Pour la juge, la NTA est un département du gouvernement qui fonctionne sous l’égide du ministère du Transport. Ses officiers sont recrutés par la Public Service Commission et peuvent être transférés vers d’autres ministères. Or, si c’était une Body Corporate, ses officiers auraient été recrutés par son board et n’auraient pu être transférés vers d’autres ministères. Qui plus est, la NTA reçoit son budget du ministère des Finances et les revenus perçus par elle sont crédités à l’Accountant General.

Ce jugement prend à contre-pied un autre jugement de la Cour suprême (l’affaire Dveela Transport v. NTA en 2014), où il avait été retenu que la NTA était bien une Body Corporate qui pouvait être poursuivi à son propre nom. Toutefois, c’était un jugement interlocutoire qui ne constitue pas une jurisprudence. D’autres jugements de la Cour suprême font aussi ressortir que la NTA est bien une Body Corporate. La plainte des 62 opérateurs d’autobus individuels a ainsi été rejetée à leurs dépens.