L’extension de la ligne ferroviaire à Saint-Pierre et Côte-d’Or connaît un coup d’accélérateur après l’annonce, lundi, du Haut-commissaire de l’Inde, Nandini Singla sur le financement du projet par l’Inde, via une nouvelle ligne de crédit s’élevant Rs 13,5 milliards assortie d’une subvention de Rs 1,1 milliard de l’EXIM Bank. Une décision qui n’en finit pas de faire couler de l’encre en cette période de vaches maigres.
Loin de nous l’idée de remettre en question un quelconque prolongement permettant une desserte rapide et efficace. Sauf que chronologiquement, la réalisation du tronçon Réduit – Saint-Pierre – Côte d’Or (phase 4) n’intervient pas dans la continuité de la construction de la première et deuxième phase (Port-Louis – Curepipe) dont la viabilité financière donne toujours lieu à bien de spéculations. D’où le scepticisme du député et ingénieur civil Osman Mahomed sur la capacité du pays à honorer le remboursement de ses dettes. Il demande à ce que le rapport de faisabilité de cette extension soit rendu public dans l’intérêt des contribuables.
On commence à y voir un peu plus clair sur la prochaine étape du prolongement du métro vers la circonscription du Premier ministre. Selon des sources du dossier, bien que la majeure partie du parcours, long de 10,5 km, sera au sol, il comportera aussi quatre structures aériennes, sises principalement à Réduit (devant l’hôpital Wellkin et surplombant deux rivières) et à Côte d’Or. Concrètement, de Réduit, les Light Rail Vehicles (LRV) se dirigeront vers Moka, Gentilly, Saint-Pierre (aux abords du centre commercial Kendra), Côte d’Or pour aboutir à Hermitage. Le constructeur Larsen & Toubro (L&T) partira forcément avec les faveurs des pronostics dans l’exercice d’appel d’offres qui a déjà été lancé pour désigner la firme qui mettra en œuvre les travaux qui devraient démarrer en février 2023.
Une question revient en boucle après l’annonce faite par Nandini Singla : n’aurait-il pas été plus judicieux sur le plan fonctionnel, stratégique et économique de privilégier, dans un premier temps, la liaison entre Curepipe et le Sud jusqu’à l’aéroport – permettant ainsi un meilleur déplacement des voyageurs d’affaires et des touristes en général aux quartiers d’affaires d’Ébène et de la capitale –, en attendant que les projets de grande envergure immobilière se concrétisent à Moka et Côte d’Or? Osman Mahomed n’y va pas par quatre chemins dans ses analyses: « C’est une extension qui a une visée purement politique. N’était-il pas plus urgent de se focaliser sur un prolongement vers le Sud où les embouteillages sont légion ? Le CEO de MEL Dass Mootanah pa kone apre Port-Louis ek Curepipe metro ti bizin al le nor ek le sid ? Depuis plusieurs mois déjà, bien avant que le Haut-Commissaire de l’Inde annonce le financement d’US $325 millions, le concept de la Smart City de Moka est commercialisé sur la base qu’il y aurait des stations et des facilités liées au métro. En sus des zones d’ombre qui entourent l’extension rapide du trajet Rose-Hill – Réduit, on voit bien une énième fois qu’on a affaire à de fins calculateurs politiques notoires. »
« Aucune chance de réaliser des profits ! »
Osman Mahomed dit ne pas comprendre sur quel calcul le gouvernement et MEL se sont fondés pour justifier la viabilité de cette 4e phase : « Seulement 20,000 Mauriciens voyageront quotidiennement sur cette ligne, à en croire Das Mootanah. Je présume qu’il a inclu dans les 20,000 voyageurs, le nombre conséquent d’étudiants non-payants du campus de l’université et d’autres institutions d’éducation des régions qui seront desservies ? En prenant en compte le coût actuel du ticket à une moyenne de Rs 40, en sus des coûts d’opération, de financement, de la maintenance et du personnel, cette ligne au coût de Rs 13.5 milliards sur 10.5 km, soit Rs 1.3 millions par mètre linéaire, n’a quasiment aucune chance de réaliser des profits un jour ! Le ratio recettes /dépenses se dégradera au point où MEL et l’État se retrouveront en très mauvaise posture. »
Le député demande à ce que le rapport de faisabilité de cette extension soit rendu public, afin que les contribuables et les membres de l’Assemblée nationale puissent débattre autour de la question. « Ce serait injuste envers nos générations futures si mes analyses se concrétisent et le pays n’arrive pas à honorer le remboursement de ses dettes dans les échéances prévues. Notre bonne relation avec l’Inde prendrait un sacré coup et Pravind Jugnauth aura à répondre devant l’Histoire», dit-il
Le député du Parti travailliste a évoqué la nouvelle ligne de crédit accordée par l’Inde pour la route de Metro Express à côté d’Or/Réduit, lors la conférence de presse du PTr vendredi. Osman Mohomed a affirmé que l’étude de faisabilité de ce projet doit être rendue publique.
Il dit avoir remarqué que beaucoup de choses se cachent derrière ce projet, comme les coûts, la motivation entre autres. Ainsi, souligne-t-il cette étude doit être rendue publique pour voir si ce projet est fiable ou non.
Osman Mahomed souligne aussi qu’il ne sait pas sur quoi s’est basé Das Mootanah le CEO du Métro Express lorsqu’il a affirmé que le métro a connu un succès fou. Il se demande comment ils font leurs calculs.