Le concept d’Alec Issigonis était d’une intelligence rare. Pour faire face à la hausse du prix des matières premières consécutive à la crise de Suez, il crée une familiale de poche qui offrira les mêmes prestations qu’une plus grande grâce à une architecture innovante. Utilisant moins de matériaux, elle sera aussi plus légère et frugale. Ainsi naquit la Mini en 1959, la première auto à implanter transversalement à l’avant un 4-cylindres refroidi par eau. Elle est aussi spacieuse que la Ford Anglia mais se révèle plus de 80 cm de moins longue !
La Mini pose ainsi les bases des tractions modernes et devient progressivement un phénomène de société. Malheureusement, son constructeur ne gagne initialement pas d’argent avec elle, voire en perd, car sa fabrication s’avère complexe. Mais, au fil des évolutions, elle tiendra jusqu’en 2000, tant sont grandes ses qualités, tenue de route et look en premier lieu. Évidemment, on s’est plusieurs fois posé la question de son remplacement, sans jamais parvenir à une solution satisfaisante.
Au début des années 90, Rover, en charge de la production de la Mini, relance un projet de remplacement. En 1994, BMW rachète Rover, ce qui est une très bonne nouvelle ! En effet, Bernd Pischetsrieder, patron de la marque munichoise, n’est autre que le petit-neveu d’Issigonis et il adore la Mini. Très engagé, il va même jusqu’à reprendre les concepteurs du modèle originel, dont John Cooper et Alex Moulton, auteur de la suspension Hydragas. Mais, rapidement, les opinions divergent entre Angleterre et Allemagne au sujet de la future Mini.
Les premiers veulent une auto architecturalement innovante, comme en 1959, les seconds une auto plus chic et rentable comme l’était la version Cooper. Tout le monde se prend de passion pour le projet, qui devient vite ingérable. Le développement reste en Angleterre, puis part en Allemagne pour revenir en Angleterre où les ingénieurs vont le poursuivre selon les directives de BMW. Tant bien que mal.
Les désaccords apparaissent au grand jour en 1997, quand trois concepts de Mini sont présentés. L’un, néo-rétro, l’ACV30, est dû à Adrian van Hooydonk et Frank Stephenson, de BMW, les deux autres, les Spiritual et Spiritual Two, architecturalement plus audacieux, à Oliver Le Grice, designer de l’équipe anglaise.
Ces derniers avaient été rejetés par le directoire allemand en 1995 ! Les ingénieurs britanniques conçoivent sans enthousiasme la plateforme et les suspensions (jambes McPherson à l’avant, essieu en Z à l’arrière, donc rien à voir avec la Mini originelle) sans l’aide de Moulton, remercié sans ménagement…
Mais le moteur Rover K ne passe pas sous le capot de la carrosserie imaginée par Frank Stephenson et validée autoritairement par Wolfgang Reitzle, supervisant tant bien que mal le développement. Celui-ci refuse qu’on la modifie ! Solution : BMW s’associe avec Chrysler pour former une joint-venture, Tritec, qui concevra un nouveau, produit au Brésil. Ainsi naquit le bloc Pentagon. Pourquoi faire simple…
Par ailleurs, la faible place disponible pour la mécanique cause des soucis infinis : comment assurer de bons débattements de suspension avec des jantes de 17, loger une direction assistée et un moteur 1,6 l dans si peu d’espace ? Les conflits anglo-allemands atteignent un degré tel que Pischetsrieder, dépassé, fait appel à un consultant extérieur, Unicorn, pour arbitrer les décisions. Avant d’être lui-même débarqué avec Rietzle en 1998 !
Le projet retourne en Allemagne pour y être finalisé, et la nouvelle Mini, codée R50, est présentée au Mondial de Paris 2000. C’est un triomphe ! Deux versions sont proposées, la One et la Cooper, toutes deux mues par un 1,6 l, 90 ch dans le 1er cas, 115 ch dans le second. L’équipement est complet, puisque vitres électriques, clim, radio et ABS sont de série.
La Cooper ajoute les jantes alliage, la sortie d’échappement chromée ou encore la suspension sport. Les prix ne sont pas si élevés : 99 705 F (20 000 € actuels selon l’Insee) pour la One, 111 185 F pour la Cooper (22 300 € actuels). Les ventes démarrent en trombe, et une liste d’attente se forme. En 2002, une sportive Cooper S, forte de 163 ch grâce à l’adjonction d’un compresseur sur son 1,6 l, déboule.
Elle bénéficiera de préparations signées John Cooper Works qui méritent un sujet dédié. En 2004 arrive le cabriolet, qui accompagne le léger restylage, où la Cooper S passe à 170 ch. Peu après, un 1,4 l diesel est proposé, fourni par Toyota, en même que plusieurs séries limitées sont proposées : Seven, Checkmate, Park Lane.
La Mini R50 finit sa carrière en 2006, remplacée par la R56. Plus de 600 000 Mini R50 ont été vendues en Europe : joli score. La R56 qui la remplace utilise des blocs PSA-BMW, mais le Tritec de la R50 finira par se retrouver sous le capot de la… Tipo II (où il se renomme E.torq), Fiat en ayant racheté les droits en 2008 !
Combien ça coûte ?
Pour une One ou une Cooper en bon état, mais dépassant les 200 000 km, les prix sont relativement similaires : comptez 2 500 €. Ajoutez 1 000 € pour une auto de moins de 150 000 km. Si vous en voulez une de moins de 80 000 km, alors ce sera 5 000 € minimum. Ça grimpe !
Les Cooper S sont plus chères, en toute logique, nécessitant une rallonge de 1 500 € face à la Cooper à état équivalent. Quant aux cabriolets, ils sont 2 000 € plus onéreux que leurs versions fermées équivalentes. Les Mini Cooper S coupé ou cabriolet les plus chères dépassent déjà les 10 000 € en parfait état.
Quelle version choisir ?
Tout dépend de l’usage, mais en restant raisonnable, une Cooper 115 ch représente un choix équilibré, de préférence en boîte manuelle.
Les versions collector
Là, ce seront plutôt les Cooper S, en parfait état, bien optionnées et à faible kilométrage. Autant dire qu’elles se raréfient à vitesse grand V, surtout en série limitée.
Que surveiller
C’est là que ça se complique. La Mini a un passé chargé en matière de fiabilité. Bonne nouvelle, le bloc Tritec, à distribution par chaîne se montre intrinsèquement solide, mais il a chaud sous le petit capot, donc nécessite un circuit de refroidissement parfaitement entretenu. Sinon, surchauffe et claquage de joint de culasse à la clé. Sur la Cooper S 163 ch, la chaîne peut devenir bruyante vers 150 000 km : il faut alors la changer.
Les principaux soucis concernent la boîte de vitesses, aux roulements fragiles. Ça s’améliore en cours de carrière, surtout après 2004, mais certaines ont cédé dès 30 000 km. Des vidanges régulières atténuent le problème. Les embrayages sont, eux aussi, fragiles, tout comme la déplaisante boîte CVT.
Autre avarie régulière, la pompe de direction assistée, peu endurante : à vérifier avant achat. Si elle émet un bruit suspect, il faudra la changer, ce qui revient à près de 800 €.
Enfin, des soucis électroniques divers, des fuites et des couinements se manifestent à plus ou moins brève échéance. Ce n’est pas très grave mais souvent pénible à résoudre.
Au volant
C’est fou de voir qu’après plus de vingt ans, la Mini Cooper n’a pas vieilli. Ni à l’extérieur ni à l’intérieur, sauf si on aime les tablettes digitales. On profite aussi d’une bonne position de conduite, même si le volant ne se règle qu’en hauteur, mais les places arrière sont pratiquement sacrifiées. Devant soi, on ne trouve que le compte-tours, le tachymètre étant relégué au centre. On s’y fait, mais les basculeurs, mal repérés, ne sont pas pratiques.
Le moteur 115 ch émet une sonorité pas déplaisante, et se montre souple. Ensuite, il monte gentiment en régime, mais n’aime pas spécialement taquiner la zone rouge. En fait, il préfère évoluer vers le milieu du compte-tours, où il distille un punch plaisant mais pas délirant.
Bien étagée, la boîte 5 le seconde efficacement, surtout qu’elle se révèle plaisante à manier, mais c’est encore le châssis l’élément le plus plaisant de cette Mini. Direction communicative et rapide, train avant précis, arrière qui enroule à la demande, on prend un certain pied à emmener cette petite anglaise vivement dans les virolos.
Surprise, la Mini n’est pas trop bruyante sur autoroute, et sa suspension ferme mais sans excès (sauf peut-être à l’arrière) autorise un confort correct.
En somme, une petite auto stylée, dynamique, et prodigue en sensations côté châssis. Elle a aussi le mérite de consommer raisonnablement : 8 l/100 km en moyenne.
L’alternative youngtimer
Mini Cooper 1.3i (1991-2000)
En 1990, la Mini originelle entre dans sa 6e génération, disponible uniquement avec le 1,3 l, qui gagne une injection dès 1991. Développant 63 ch, il octroie à la puce britannique de jolies performances, même si elles ne valent pas celles de la Cooper S des années 60. Affichant 700 kg sur la balance, la Mini se montre vive, mais pas très rapide en raison de son aérodynamique d’un autre âge. Du reste, sa boîte 4 tire court.
La Mini est modifiée en 1996 (7e génération), adoptant des voies élargies, un radiateur monté face au moteur (et non plus sur le côté), un tableau de bord élargi, une injection bipoint, voire un airbag. Sur la Cooper S qui fait son retour, de nouvelles jantes de 13 apparaissent, et une batterie de projecteurs barre la calandre, mais la puissance reste à 63 ch. Plus séduisante que jamais, la Mini Cooper durera jusqu’à la fin 2000, faisant la jonction avec la R50. À partir de 9 000 €.
Mini Cooper R50 (2001) la fiche technique
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