Malheureusement, ces objectifs n’ont pas été atteints. Ce qui est sûr, c’est que les exportateurs d’armes indiens ont fait de bonnes affaires avec nos deniers. De plus, certains équipements achetés aux Indiens seraient destinés aux Indiens eux-mêmes, surtout à Agaléga, qui leur a déjà été offert…
L’ancien hautcommissaire indien Abhay Thakhur, prédécesseur de Nandini Singla, préparait déjà l’esprit des Mauriciens, dès juin 2018, lorsqu’il regrettait que Maurice soit le pays disposant du budget «le plus bas au monde» concernant sa sécurité maritime. Que voulait-il dire par là ? Que Maurice doit dépenser encore plus en achetant plus de produits navals indiens ?
En tout cas, en 2021, un accord est signé à New Delhi entre nos deux pays pour une ligne de crédit de 100 millions de dollars (environ Rs 4,5 milliards) pour l’acquisition d’équipements pour la National Coast Guard (NCG) et l’Helicopter Squadron. Cependant, et on tend à l’oublier, ces prêts devront être remboursés… Le 27 mai 2017, Pravind Jugnauth rencontrait Narendra Modi à New Delhi, où ce dernier annonçait 500 millions de dollars (environ Rs 23 milliards) et non 100 millions de dollars (environ Rs 4,5 milliards) de crédit à Maurice. Le Premier ministre indien précisait, selon The Economic Times, que ces prêts serviraient à divers projets. On ne sait pas si cette somme comprenait d’autres projets comme la construction de la Cour suprême et le métro, entre autres.
Le 16 août 2017, la livraison du «CGS Valiant» est effectuée.
Revenons en arrière. Fin décembre 2014, le Barracuda est livré à Maurice. C’est le premier navire de guerre exporté par l’Inde. Prix : 58,5 millions de dollars (Rs 2,7 milliards). Et tout comme les hélicoptères de Hindustan Aeronautics Limited (HAL) et les avions Dornier, Maurice est le premier et probablement le seul client attitré des constructeurs indiens. Interrogé, en décembre 2015, par un journaliste de l’Economic Times, le ministre des Statistiques indien, Rao Inderjit Singh, assurait que le chantier naval appartenant au gouvernement indien, Garden Reach Shipbuilders & Engineers Ltd, avait aussi reçu des commandes pour des patrouilleurs du Sri Lanka. Et bien que l’on parlât aussi de commandes venant des Philippines, du Bangladesh, de la Guyane et du Vietnam, aucune exportation vers d’autres pays que Maurice et les Seychelles n’a été enregistrée de la part de ce constructeur.
En 2017, la décision de réparer le «CGS Guardian» a été prise, et en juin 2018, le bateau revient à Port-Louis après une réparation coûtant Rs 100 millions.
La décision de retaper le CGS Guardian avait été prise en 2017. Le bateau est revenu à Port-Louis en fanfare en juin 2018. Coût de cette réparation : Rs 100 millions. On parle d’une subvention de l’Inde, mais on ne dit pas pour quel montant exact. L’ancien haut-commissaire de l’Inde, Abhay Thakur, rappelait à cette occasion que le projet de coopération «Trident» entre l’Inde et Maurice visait à renforcer la surveillance maritime dans l’océan Indien, ainsi que les capacités de Maurice dans la réparation des bateaux de la NCG sous la supervision de l’expertise technique indienne. En fait, les Mauriciens n’ont jamais été autorisés à réparer ni n’ont-ils reçu la formation nécessaire. (voir plus loin)
En novembre 2016, le patrouilleur «CGS Victory» est livré. Prix du navire et le «Valiant» : Rs 1,6 milliard.
En novembre 2016, le patrouilleur CGS Victory était livré. On parle d’un prix global de Rs 1,6 milliard pour ce navire, plus le CGS Valiant qui allait être livré en 2017. Et on apprenait le même jour que le CGS Valiant allait être entièrement financé par Maurice. Résultat : on ne connaît ni le coût de chaque patrouilleur ni combien a été puisé de la ligne de crédit indienne de 100 millions (ou 500 millions) de dollars. Ce qui est intéressant, une source anonyme affirmait aux journalistes ce jour-là que c’est un lieutenant-commandant de la marine indienne qui serait aux commandes du CGS Victory pendant deux ans et qu’un Mauricien lui succéderait à la fin de son contrat. À ce jour, aucun Mauricien n’a pris le contrôle du CGS Victory. Plus intéressant encore, la même source déclarait que le Victory pourrait aller jusqu’à Agaléga, alors que le CGS Guardian ne le pouvait pas. On entendra assez souvent parler d’Agaléga…
Concernant le Valiant, Pravind Jugnauth déclarait, le 16 août 2017 lors de la livraison du navire : «Avec la transformation de Port-Louis en un hub, on s’attend à une croissance économique dans notre port qui pourrait être très actif dans la région.» On sait maintenant que le secteur a connu depuis une… décroissance plutôt. Le Premier ministre parlait également de la sécurité maritime et invitait la NCG à lutter contre les barons de la drogue. Il reprenait les mêmes arguments utilisés par son père, en mars 2016, pour ces gros investissements : lutte contre le trafic de drogue et la capacité de contrôler notre zone économique exclusive en vue de l’émergence d’une économie bleue. Encore une fois, le contrôle s’est révélé négatif.
Les hélicoptères et les avions
25 millions de dollars américains, soit Rs 1,1 milliard, pour le Dhruv MK-III. On épargnera les lecteurs de ce qui a déjà été dit et écrit sur cet engin. Sauf pour rappeler ce que Pravind Jugnauth avait lui-même reconnu, le 28 août 2020, à la suite de la catastrophe du Wakashio : «Parmi les six hélicoptères, seul le Dhruv dispose de capacités de vol de nuit, mais n’a pas pu être déployé car il était en maintenance jusqu’au 7 août 2020.» Pour rappel, le Police Helicopter Squadron compte quatre Chetak, un Fennec français et deux Dhruv.
Le «Dhruv MK-III» a coûté 25 millions de dollars américains, soit Rs 1,1 milliard.
Le 6 avril 2022, un troisième Dornier est livré par le HAL aux autorités mauriciennes. Prix : 16 millions de dollars (Rs 750 millions). Ce prix «catalogue», nous dit un professionnel de l’aviation, aurait pu être ramené à 50 % de moins s’il y avait eu une négociation. «Mais quel genre de négociation y a-t-il eu ?» À noter que c’est encore une fois notre pays qui est le premier client à commander ce type d’avion de HAL. Le but affiché : faciliter l’accès aux autres îles, dont Agaléga, a-t-il été précisé, et bien sûr «pour accroître nos capacités de surveillance maritime».
Le «Police Helicopter Squadron» compte quatre Chetak
Auparavant, un avion Dornier a été prêté en septembre 2021 à la NCG et retourné aux Indiens le 23 mars 2022, en attendant celui qui a été commandé en février de la même année et livré le 6 avril 2022. Selon une source, l’achat de ce quatrième Dornier a été inutile car il aurait suffi de retirer certains équipements non nécessaires d’un Dornier existant pour permettre de transporter plus de passagers. «C’est ce qu’ont du reste fait les Indiens avec le nouveau Dornier qui nous a été vendu et qui est exactement le même modèle que les trois précédents.» Et d’ajouter que ce sont uniquement les officiers indiens qui décident de l’acquisition des avions, les officiers mauriciens n’ayant pas le droit de remettre en question la qualité et la sécurité des équipements fournis. Bref, ce sont les Indiens qui parlent aux Indiens et ce sont eux qui ont le contrôle total de ces décisions.
Aux dernières nouvelles, l’un des quatre Dornier a été définitivement mis au sol et a été remis à Polytechnics Mauritius pour répondre aux besoins de formation de nos étudiants. L’avion patrouilleur Defender acquis d’Angleterre à des fins de formation a, quant à lui, déjà été vendu. Parmi les trois Dornier restants, l’un est actuellement en réparation en Inde.
Quid du «barracuda» et des radars ?
On apprend que l’hélisurface du patrouilleur maritime «Barracuda» n’a jamais été utilisée dans des conditions réelles. «Les pales de l’hélico parviennent à peine à éviter de heurter les installations du bateau. Pendant les entraînements, nous avons tout le temps nécessaire pour nous assurer que l’hélicoptère se pose sans heurts…» De plus, d’autres informations surprenantes émergent : les bateaux de la NCG ne sortent pas le week-end et les jours fériés. Pourquoi ? Parce que les officiers indiens qui les commandent ne travaillent presque jamais ces jours-là. Quant à la formation tant attendue des Mauriciens, elle se fait toujours attendre. Le site de la marine indienne informe que le système de surveillance côtière par radar, inauguré en janvier 2015, sert principalement à l’échange d’informations sur les mouvements suspects en mer. «Comme dans le cas du «Wakashio» ou des Chinois ?» ironise une source.
Comment les Indiens se sont incrustés à Maurice
Les Indiens se sont introduits à Maurice dès 1974 lorsqu’ils ont fait don du premier patrouilleur «Amar». Et d’un simple lieutenant-commandant, on a maintenant à la NCG un capitaine de la marine et une douzaine d’officiers indiens. Le «Marine Commando» (MARCOS) de la NCG est aussi dirigé par un Indien alors que son équivalent terrestre, le GIPM, a, lui, un Mauricien à sa tête. Le MARCOS est en fait beaucoup plus impliqué dans les opérations terrestres aux côtés de l’ADSU, nous dit-on. Ce n’est que très rarement que l’équipe de MARCOS monte à bord des navires de la NCG.
Des hangars construits avec l’argent emprunté d’inde pour servir aux Indiens d’Agaléga ?
On apprenait le 24 juillet 2015, grâce au site sud-africain Defence Web, que Maurice comptait acheter 12 navires militaires d’Inde, plus précisément de Goa Shipyard Limited. Le site nous informait également qu’un nouveau hangar sera construit «on one of the main islands to give the force (NdlR, NCG) the capacity to service its own aircraft». De quelle île s’agissait-il ? Agaléga ? Car, finalement, pas un, mais plusieurs hangars d’avions ont bien été construits à Agaléga, comme nous le révélera la MBC elle-même le 10 novembre 2022. Des hangars construits avec l’argent emprunté d’Inde pour servir aux Indiens d’Agaléga ? C’est la question que l’on se posait vu l’immensité de ces hangars par rapport aux Dornier et, surtout qu’en mai 2022, le magazine indien Swarajya écrivait que ces hangars pouvaient abriter des Navy’s Submarine Hunting P 81 Aircrafts. Et d’après l’Economics Time du 19 novembre 2020, ces Poseidon 81 de fabrication américaine avaient été achetés par l’Inde pour surveiller le mouvement des sous-marins chinois. Maurice a-t-elle besoin de surveiller des sous-marins chinois ou russes ?
En revanche, le gouvernement mauricien avait, le 8 octobre 2021, lancé un appel à expression d’intérêt à l’international pour la pêche aux poissons vivant en eau profonde (Demersal Fishing) tout en ajoutant que ce genre de pêche se fait dans les lagons et les eaux peu profondes. Ce qui avait fait beaucoup rire à l’époque. En tout cas, ce qui avait inquiété nos pêcheurs, c’était l’ouverture de cette pêche aux compagnies étrangères. Deux ans après, on ne sait pas quelles sont les compagnies qui ont exprimé le souhait de pratiquer ce curieux genre de pêche. Un expert maritime se demandait, lui, si tout ce cinéma n’était pas fait pour permettre aux Indiens de renifler les sous-marins chinois.
Les questions posées à la police
Nous avons demandé, le 6 septembre, à la police de nous communiquer des informations. Nous sommes en attente de ses réponses. Ci-dessous les questions envoyées :
-Quel est le nombre d’opérations menées en mer par le MARCOS depuis sa création ?
-Quel est le nombre de saisies de drogue en mer depuis les cinq dernières années ?
-Quel est le nombre de perquisitions effectuées par le Barracuda, le Valiant, le Victory et les autres navires depuis les cinq dernières années ?
-Quel est le nombre de trafics de drogue et autres mouvements suspects en mer détectés par les Dornier et les radars indiens installés autour de notre île ?
-Est-ce que les bateaux de la NCG ne sortent pas le week-end et les jours fériés ?
-Est-ce que les Indiens forment les Mauriciens ?
-Combien de Dornier sont en opération actuellement ?
-Quel est le prix qui a été payé pour le CGS Victory ?
-Y a-t-il des Mauriciens qui commandent les navires de la NCG ?
-Quelles sont les compagnies qui ont obtenu une licence pour pratiquer du Demersal Fishing après un appel à expression d’intérêt à l’international lancé le 8 octobre 2021 ?
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