Voitures électriques : pourquoi la recharge ultra rapide n’existera jamais

4 years, 1 month ago - 21 October 2020, automobile-magazine
Voitures électriques : pourquoi la recharge ultra rapide n’existera jamais
Comme d’autres constructeurs et fabricants avant elle, la start-up Nawa Technologies a annoncé récemment plancher sur un dispositif permettant de récupérer 800 km d’autonomie électrique en 5 minutes.

Mais aujourd'hui, comme hier, ces annonces font fi des limites de la physique, qui renvoient la recharge ultra-rapide au statut de doux rêve.

Les départs en vacances le la Toussaint n'ont peut-être pas été de tout repos pour les propriétaires de voitures électriques. Depuis quelques jours, le réseau de recharge Ionity, environ 50 bornes en France, bat de l'aile. Certains chargeurs seraient en effet bridés à 24 kW de puissance, bien loin des 350 kW autorisés au maximum, transformant de simples pauses de voyage en véritables galères. Ce bug fort fâcheux viendrait d'une mise à jour faite par le fabricant, sans que l'on en sache vraiment plus. S'il sera très rapidement résolu, ce dysfonctionnement rappelle une nouvelle fois que la recharge du véhicule électrique reste l'un des principaux freins à l'achat. Le prix aussi, mais celui-ci dépend surtout des aides que l'Etat est prêt à mettre en place. En revanche, les promesses faites par constructeurs et fabricants ne repousseront jamais les limites de la physique. Récupérer quelque 800 km d'autonomie en 5 minutes comme Nawa Technologies, une star-up, l'a encore annoncé récemment, n'arrivera jamais. On vous dit pourquoi.

Des données inamovibles avec l'énergie électrique
D'abord, il faut rappeler que les curseurs de l'électrique sont aujourd'hui inamovibles. Vulgairement : qui dit grosse autonomie dit grosse batterie, grosse puissance, "gros" temps de recharge et "très gros" prix. Inutile d'attendre de nos constructeurs qu'ils inventent une voiture électrique de 150 ch offrant 800 km d'autonomie, c'est techniquement impossible. Il faut donc s'en tenir à ce que l'on sait, c'est-à-dire qu'aller loin en électrique implique un énorme accumulateur, lequel est d'autant plus longue à recharger lorsqu'il est vide. Avec des chiffres, la théorie devient beaucoup plus concrète.

Une énergie électrique ingérable
Pour parcourir 1 000 km avec un "plein", il faut une batterie d'environ 200 kWh, qui pèse entre 1,2 et 1,3 tonnes. En plein débat sur le malus au poids, il est déjà permis de rire. Mais en conservant ces données et pour faire écho aux annonces de Nawa Technologies, 80 % de 200 kWh représentent 160 kWh. Pour remplir 160 kWh en 5 minutes, il faut en acheminer 185, car le chargeur croque lui-même de l'énergie. Or, pour acheminer 185 kWh en 5 minutes de temps, la puissance de charge s'élève à 2,2 mégawatts (!), soit une énergie absolument colossale et presque risible au regard des 350 kW que peut aujourd'hui fournir un chargeur Ionity et qu'aucune batterie ne peut "avaler". Pour rappel, les superchargeurs ne délivrent jamais la puissance totale tout le long de la charge. Ils démarrant doucement, augmentent en intensité et ralentissent à la fin, à l'image du remplissement d'une bouteille d'eau.

Au-delà même de la capacité d'ingurgitation de la batterie, faire circuler une telle quantité d'énergie est impossible. A part en utilisant un barreau de cuivre d'au moins 10 cm de diamètre, aucun dispositif ne peut transporter ce courant sans fondre instantanément. Enfin, sauf au pied d'une ligne à haute tension, aucune chance de trouver 2,2 MW d'énergie disponible. Sans parler du coût d'acheminement s'il fallait déplacer toute cette électricité.

Promesses dans le vent
Même si la voiture électrique peut correspondre à certains usages, les progrès annoncés sur l'autonomie et le temps de recharge ne sont pas pour demain. Même en prenant des objectifs moins ambitieux que les annonces souvent faites pour attirer des investissements, l'équation est presque insoluble. La recharge rapide sur téléphone fonctionne, mais elle ne peut être transposée au monde de l'automobile. La technologie lithium-ion n'étant pas près d'être remplacée, aller loin en voiture électrique implique pour des années encore des voitures lourdes, qui gagnent en autonomie ce qu'elles perdent en poids de batterie à trainer. Quant à la problématique de la recharge, si les annonces des 100 000 bornes électriques des prochaines années sont de nature à rassurer, elles ne feront pas diminuer pour autant le temps passé à la station.