Importation de Voitures de Seconde-Main : Un Véritable Parcours du Combattant

il y a 11 années - 11 Avril 2013, The Défi Media Group
Importation de Voitures de Seconde-Main : Un Véritable Parcours du Combattant
Le courant ne passe pas entre certains importateurs de véhicules de seconde-main et le ministère du Commerce. Ils déplorent le retard dans le traitement de demandes de permis ainsi que la lourdeur administrative.

Pour eux, la solution réside dans l’informatisation complète du système, dans le sillage du projet e-government et l’élimination des étapes archaïques qui n’ont plus leur raison d’être en 2013.

Des importateurs de véhicules de seconde-main sont dans la tourmente. Ils pointent du doigt la lenteur administrative et les procédures qui vont à l’encontre du principe de ‘Business Facilitation’ prôné par le gouvernement. D’autres estiment qu’ils sont injustement pénalisés au profit des concessionnaires de voitures neuves.

Ce n’est pas la première fois que des importateurs sont en désaccord avec les autorités, car, à chaque fois que le ministère du Commerce vient avec de nouvelles mesures, dans le but de protéger les consommateurs, des importateurs expriment leur désapprobation. Dans certains cas, les importateurs de seconde-main sont également en désaccord avec les concessionnaires de véhicules neufs qui, selon eux, jouissent des facilités.

Les nouvelles mesures

La ‘Consumer Protection (Price and Supplies Control) Act’ a été amendée depuis le 1er mars 2013. Elle a revu à la hausse les frais d’enregistrement et ceux des différents permis. Elle rend aussi obligatoire l’obtention d’une « auction sheet » pour chaque véhicule importé. Ce document doit spécifier le grade du véhicule.

Les véhicules en dessous du grade de 3,5 sont interdits à l’importation. Le Président de la ‘Dealers of Imported Vehicles Association’ (DIVA), Zaid Ameer, accueille cette mesure qui garantit la qualité des véhicules offerts aux acheteurs. Toutefois, il préconise la vigilance car de tels certificats peuvent être émis par n’importe qui au Japon.

D’autre part, les règlements ont été modifiés en 2011, en ce qui concerne le délai pour le traitement des dossiers. Auparavant, une demande de permis devait obligatoirement être traitée en trois jours ouvrables, ce qui facilitait les affaires, mais depuis 2011, il n’y a aucun délai prescrit pour le traitement de dossiers. Cette situation est fortement déplorée par les demandeurs de permis d’importation.

Radiation

Lorsque le Japon fut frappé par un tsunami qui avait causé des dégâts à un réacteur nucléaire, le ministère avait alors exigé que les véhicules obtiennent un certificat antiradiation. Pour les importateurs, c’est ridicule de continuer à demander ce certificat deux ans après la catastrophe au Japon.

L’Import Unit

L’Import Unit du ministère du Commerce a pour rôle de délivrer des permis d’importation pour les ‘controlled goods’, dont font partie les véhicules de seconde main. Cette unité émet aussi les ‘Licences’ pour opérer comme importateur des véhicules de seconde-main. Elle conseille également les membres du public sur les procédures à suivre pour obtenir ces permis, pour importer des articles contrôlés et pour lancer une nouvelle entreprise dans ces secteurs.

L’informatisation du système

Les importateurs que Le Défi Économie a rencontrés sont unanimes à dire qu’il est temps que le système de demande de permis ou de renouvellement soit informatisé. « Alors que le gouvernement vient d’investir Rs 50 millions dans un portail moderne, alors que le ministre des Finances appelle à l’élimination de la bureaucratie excessive, il est regrettable que le ministère du Commerce opère toujours de façon archaïque.

D’ailleurs, il faut éliminer l’usage du papier et offrir des services en ligne. C’est aussi en harmonie avec Maurice Île Durable. Même le département des Douanes et la MRA sont maintenant entièrement informatisés. On ne peut plus, en 2013, faire un va-et-vient incessant entre différents bureaux pour un permis. D’ailleurs, même le Judiciaire vient de lancer un service en ligne », clament-ils.

M. Esoof de Three M’s Motors : « Nous attendons toujours notre permis »

Le directeur de Three M’s Motors, basé à Terre Rouge, a contacté le Défi Economie pour exprimer ses griefs. Selon M. Esoof, son permis d’importateur de voitures de seconde main a expiré le 1er avril 2013. Comme le veut la procédure, il a fait une demande de renouvellement au moins un mois en avance, soit le 20 février 2013.

Toutefois, à ce jour, le permis n’est pas encore délivré. « Ce qui m’exaspère, ce que j’ai suivi toutes les procédures à la lettre, mais ce sont les officiers du ministère qui sont en retard. Cela me pénalise car je ne peux ni commander ni dédouaner ou enregistrer des véhiculés sans mon permis ». Il précise qu’il a fourni tous les documents requis, et malgré plusieurs appels au département concerné, personne ne lui indique le statut du dossier. « Il faut réaliser que nous sommes des entrepreneurs comme les autres, nous payons la taxe et les patentes, et nous employons des gens. Nous demandons un traitement efficace de la part des autorités ».

Fezal Dilhossain, de Kings Motors : « Le traitement frise l’injustice »

Fezal Dilhossain, directeur de Kings Motors, traîne le ministère du Commerce en justice pour abus de procédures. Selon cet importateur, le ministère lui a imposé des amendes alors qu’il était en règle. « La faute revient au ministère du Commerce. Ils ont mis du temps à délivrer mes permis, et mes voitures sont déjà arrivées entre-temps. Je refuse d’être pénalisé par la faute des officiers. Le retard dans le traitement de mes demandes m’a causé d’énormes inconvénients, et des coûts additionnels, d’où ma décision de poursuivre les autorités ».

Fezal Dilhossain avance qu’il ne comprend pas pourquoi le ministre du Commerce, Cader Sayed Hossen, opère à l’encontre de la vision du Premier ministre qui est de démocratiser l’économie et faciliter la vie des entrepreneurs. « Les concessionnaires des voitures neuves n’éprouvent pas les mêmes difficultés que nous. Pour nous, c’est un véritable parcours de combattant. Est-ce qu’on nous harcèle délibérément afin que nous fermions boutique et laisser le champ libre aux grands concessionnaires ? », se demande-t-il. « Nul besoin d’être un expert pour comprendre que le système est complètement dépassé.

Pourtant, le ministre de tutelle, lui-même un ancien haut cadre du secteur privé et de la Chambre du Commerce, ne voit nullement la nécessité de moderniser ». Il poursuit en disant qu’ils subissent un service lent à cause d’une frustration de certains officiers. « La dernière fois quand j’ai demandé pourquoi le service devient si inefficace, les officiers m’ont dit qu’ils sont surchargés et ils ne sont pas payés pour le travail supplémentaire. Donc, c'est nous qui souffrons alors qu’on paie pour le service car la licence coûte Rs 60 000 par an ».

Chiffres

Au 28 février dernier, le nombre de véhicules neufs vendus à Maurice, excluant les deux-roues, était de 2 070 alors que 957 véhicules de seconde-main importés ont été mis sur route durant la même période. En 2012, un total de 9 562 véhicules (excluant les deux-roues) ont été vendus, contre 5 580 véhicules de seconde-main importés. En 2011, les chiffres correspondants étaient de 8 093 et 4 328 respectivement.

Zaid Ameer : « Pas d’évolution positive au niveau des procédures »

Zaid Ameer, Président de la Dealers of Imported Vehicles Association (DIVA), trouve aberrant que les procédures n’ont pas évolué au niveau du ministère du Commerce, depuis des années, alors que la plupart des autorités gouvernementales sont déjà à l’ère de l’e-government. Il cite comme exemple la nécessité de demander un nouveau permis d’importation pour chaque véhicule importé, alors qu’il aurait été plus efficace de donner un seul permis car tous les opérateurs connaissent les lois et les règlements et ils savent déjà quel type de véhicule ils ont le droit d’importer et quelles sont les conséquences de ‘non-compliance’.

« Il suffit simplement de sanctionner sévèrement les abus découlant d’un post-contrôle au lieu de réguler en amont, ce qui augmente la bureaucratie et les coûts », dit-il. D’autre part, les opérateurs perdent trop de temps avec les procédures et documentations et les queues interminables, que ce soit au Registrar ou à la NTA. « Or, tout cela aurait pu se faire en ligne au lieu de faire bouger les gens entre plusieurs départements. Beaucoup des procédures n’ont plus leur raison d’être. Il faut impérativement évoluer ».

Le ministère : Permis délivré en 3 jours, sauf imprévu

Un préposé du ministère du Commerce a dit que les demandes sont toujours traitées en trois jours ouvrables, si le dossier est complet. « Nous sommes là pour faciliter les entrepreneurs. Nous essayons toujours de traiter les demandes le plus vite possible. Bien sûr, il arrive des fois où un retard est inévitable, par exemple, si un dossier manque certaines informations cruciales, ou pour cause de force majeure, comme c’était le cas lundi dernier à cause des inondations. Mais en général, tout se passe vite », précise l’officier qui a souhaité garder l’anonymat.

Pénalité

L’amende infligée en cas de non-obtention d’un permis, avant l’embarquement d’un véhicule du Japon, est passée de Rs 25 000 à Rs 110 000. En même temps, les importateurs notent des délais plus réguliers dans le traitement des dossiers. Certains se demandent si ce n’est pas délibéré pour se faire de l’argent mais aussi pour décourager les importateurs. Par contre, l’amende pour les véhicules venant du Royaume Uni est à Rs 50 000.