La batterie d'une voiture électrique peut-elle être recyclée ?

il y a 2 mois - 21 Octobre 2024, automobile-magazine
La batterie d'une voiture électrique peut-elle être recyclée ?
Une batterie n'est pas forcément bonne à jeter lorsqu'elle n'a plus assez de capacité pour animer une voiture électrique. Elle peut ensuite être utilisée dans d'autres domaines, comme le stockage d'énergie. Reste à s'assurer que l'automobiliste profite aussi de cette source de revenus potentielle…

Composant le plus cher d'une voiture électrique, la batterie cristallise les principales inquiétudes autour de ce type de motorisation. Ses détracteurs l'accusent d'être trop polluante à produire, de prendre feu facilement ou encore d'être impossible à recycler. Abondamment relayées sur les réseaux sociaux, ces affirmations sont souvent approximatives, quand elles ne sont pas totalement fallacieuses. Pour tenter de lutter contre certaines de ces idées reçues, l'association Avere-France, qui promeut la mobilité électrique, a profité du Mondial de Paris 2024 pour présenter une étude consacrée aux "vies de la batterie du véhicule électrique". Elle rappelle que ces précieux accumulateurs peuvent souvent encore servir à autre chose lorsque leur capacité passe sous les 70 %, le seuil généralement considéré comme minimal pour un usage automobile. Mais elle fournit aussi quelques recommandations pour éviter que cette filière encore balbutiante ne donne lieu à de gigantesques gaspillages de ressources.

Une "seconde vie" qui peut prendre différentes formes

La principale utilisation envisageable pour une batterie un peu fatiguée, c'est le stockage d'énergie stationnaire. Un emploi qui pourrait devenir de plus en plus fréquent avec la montée en puissance des énergies renouvelables. "Par nature, ces énergies sont intermittentes, donc on a besoin de pouvoir les stocker pour en tirer le plein potentiel", explique Clément Molizon, délégué général de l'Avere France. " Il serait ainsi possible d'engranger l'énergie fournie par des panneaux solaires en été pour l'utiliser à l'automne ou en hiver, quand elle se révèle davantage nécessaire. Il existe déjà des murs de batterie ou des containers destinés à cet usage. Ces accumulateurs peuvent également assurer la fourniture en électricité des infrastructures dites critiques, comme les hôpitaux ou les data centers, lors d'une coupure de courant. Ils peuvent alors remplacer ou compléter des générateurs alimentés au diesel, autrement plus polluants et sonores. Mais ils peuvent également servir indirectement à d'autres voitures électriques en étant installés dans des stations de recharge rapide. En y ajoutant une ombrière avec des panneaux solaires, cela permet de simplifier le raccordement électrique, voire d'envisager une recharge moins chère.

Des constructeurs et producteurs invités à collaborer
Cette liste non exhaustive montre qu'il existe donc de nombreuses utilisations possibles pour cette "seconde vie" des batteries. Mais ces dernières ne sont pas forcément toutes adaptées à cette réaffectation. Les accumulateurs des véhicules accidentés sont par exemple mis au rebut aujourd'hui par mesure conservatoire, en raison des risques accrus de dysfonctionnement et de départ de feu. Le rapport de l'AVERE France, établi avec l'ATTE (Association Technique Energie Environnement), une autre association environnementaliste, et le cabinet de conseil Wavestone, insiste en outre sur la nécessaire collaboration des constructeurs automobiles et des producteurs de batteries. D'un côté, il veut les inciter à privilégier des "piles" conçues dès le départ pour être réparables, avec des modules dissociables et démontables. De l'autre, il demande à converger sur des règles communes pour la collecte, la transmission et l'exploitation des données de la batterie. "L'accès aux informations détaillées sur l'exploitation de la batterie pendant la première vie facilite la transition vers les usages de la seconde vie et en réduit sensiblement le coût", précise le document. Le nombre de cycle de charges rapide subis, les températures extrêmes ou les décharges trop profondes peuvent en effet dégrader fortement l'état de santé d'un accumulateur.

Pour l'heure, il reste de nombreuses incertitudes sur la durée exacte de cette seconde vie de la batterie. D'autant qu'il peut y avoir des variations fortes d'un accumulateur à l'autre. "On voit se développer des phénomènes de mort subite de la batterie", confesse Clément Molizon. "Pour une raison qu'on n'est pas encore entièrement capable de comprendre, la batterie se dégrade alors de manière extrêmement rapide." Les recherches sur le sujet se poursuivent donc. D'après Clément Molizon, cette "mort subite" reste heureusement encore rare. Mais cela ne simplifie pas l'existence d'une filière encore balbutiante : difficile de donner la valeur financière exacte d'un composant s'il est susceptible de défaillir soudainement et sans raison apparente. Même si cette "seconde vie" des batteries pourrait permettre d'augmenter fortement le prix de revente des véhicules électriques âgés, elle ne semble ainsi pas vraiment profiter aux automobilistes pour l'instant… alors qu'ils ont pourtant payé chèrement l'accumulateur de leur voiture au moment de l'achat de leur voiture. Les constructeurs automobiles ne se privent en effet pas de répercuter le coût élevé de cet organe crucial, sans prendre en compte la valeur qu'il peut conserver une fois que sa capacité est tombée sous les 70 %...

La question complémentaire de la fin de vie
Cette valeur financière pourrait même se voir encore augmentée si on arrivait à récupérer les matériaux parfois précieux qui entrent dans la fabrication de cette "pile" une fois qu'elle est arrivée en fin de vie. L'Avere-France se veut rassurante sur le sujet, évoquant des taux de recyclabilité qui peuvent déjà atteindre les 95 %, bien au-dessus des exigences légales. La réglementation européenne va en outre obliger les producteurs à une prise en compte de plus en plus importante de cet aspect. Mais l'association admet aussi que la faible quantité d'accumulateurs à traiter ne rend pas vraiment le recyclage rentable à l'heure actuelle. D'une certaine manière, c'est plutôt une bonne nouvelle. Cela confirme que la plupart des premières voitures électriques de grande série, comme la Renault Zoé ou la Nissan Leaf, sont encore aujourd'hui sur la route malgré leur âge parfois supérieur à douze ans. Pour la plupart des automobilistes, la question de la seconde vie ou de la fin de vie des batteries peut ainsi sembler… secondaire : l'essentiel reste de prolonger autant que possible la première vie. Il n'empêche que le développement d'une vraie filière de réemploi et de recyclage des accumulateurs pourrait faire office de cercle vertueux, en redonnant de la valeur à des véhicules qui ne peuvent plus continuer à rouler.