L’automobile ne connaît pas la crise

il y a 1 année, 8 mois - 2 Août 2022, caradisiac
L’automobile ne connaît pas la crise
Alors que le marché automobile connaît une chute record des ventes de véhicules neufs, jamais les résultats financiers des constructeurs n’ont été aussi bons. Explications.

Pour ce premier semestre 2022 les constructeurs automobiles annoncent des résultats financiers records. Alors même que les ventes de véhicules neufs en Europe sont en baisse de 14 % (-12 % au niveau mondial) les marques automobiles ont le sourire. Et pour cause ! Tous les indicateurs sont au vert.

Chez Stellantis on enregistre pour le premier semestre un chiffre d’affaires (88 milliards d’euros) en hausse de 17 % par rapport à la même période un an plus tôt. Le résultat opérationnel courant augmente de 44 % avec une marge à deux chiffres sur quasiment l’ensemble des marchés mondiaux.

Du côté du groupe Renault, l’optimisme est également de mise. Le chiffre d’affaires est resté stable à environ 21,1 milliards d’euros (+ 0,3 %), malgré un volume de vente en baisse de 16 %. La marge opérationnelle a quant à elle progressé de 2,6 points sur une année. Le constructeur affiche 4,7 % de marge opérationnelle hors Russie, avec un résultat net des activités poursuivies de 657 millions d'euros sur le semestre. Cela grâce à la vente de véhicules plus chers et mieux équipés, avec moins de rabais. Notamment sur le rentable segment C (Arkana, Austral, Mégane). « D’un point de vue opérationnel (en dehors de l’abandon des activités en Russie qui plombent les comptes du groupe) ce sont les meilleurs résultats de ces dix dernières années, ça marque un tournant dans l’histoire récente de Renault » explique-t-on du côté de Boulogne Billancourt.

Les constructeurs français ne sont pas les seuls. Volkswagen a augmenté ses profits de 5,7 % au cours du premier semestre. Même euphorie aux États-Unis. Ford annonce des revenus en hausse de 19 %.

Fin de crise des semi-conducteurs

La pénurie des semi-conducteurs sera-t-elle bientôt à ranger au rang des souvenirs ? La situation est en cours d’amélioration. Nombre de constructeurs annoncent un retour à la normal d’ici fin 2023. Thomas Schäfer, président de la marque Volkswagen, se veut plus optimiste et annonce « pour le second semestre de l'année (…) l'amélioration de la situation de l'approvisionnement. »

Avec en ligne de mire de meilleurs délais de fabrication et de livraison. Car si Renault affirme pouvoir aujourd’hui livrer une Arkana en trente jours, le délai d’attente moyen toutes gammes confondues est de plus de quatre mois.

La crise des semi-conducteurs a limité la fabrication de véhicules, estimée à 300 000 unités chez Renault, et plus de 100 000 unités chez Ford. En tout cas tout le monde est dans les starting-blocks. L'équipementier automobile Forvia, né du rapprochement entre Faurecia et l’allemand Hella, a publié lundi un résultat opérationnel supérieur aux attentes au titre du premier semestre. Et les commandes sont en hausse. Preuve de l’optimisme des constructeurs automobiles quant à la relance des ventes.

Carnets de commandes remplis

Suite à la pénurie de semi-conducteurs et la mise en arrêt partiel d’unités de production les constructeurs ne peuvent répondre à la demande. Chez VW, le carnet de commandes, tous types de motorisation confondus, s'élève à 728 000 véhicules rien que pour l'Europe, dont environ 139 000 ID.s 100 % électriques. Or sur le premier semestre 2022, la marque allemande n’a pu livrer que 488 468 véhicules. Le groupe s'efforce de réduire encore les délais de livraison pour les clients et de traiter le plus rapidement possible une plus grande partie de l'important carnet de commandes. Idem chez Renault ou Stellantis où les commandes vont bon train. L’augmentation des cadences ne se fera que petit à petit. Mais pour l’heure impossible de livrer plus vite.

Surcoût des matières premières

Si la marche forcée vers l’électrique et la crise des semi-conducteurs semble en passe d’être résolues, la hausse du coût des matières premières reste la principale inquiétude que doivent affronter les constructeurs automobiles.

Sur une année (janvier 2021-2022) le prix du lithium connaît une hausse de 13 % depuis début 2022. Le cours du nickel s’est apprécié de près de 60 % depuis 2020. Sur la même période le prix du cuivre s’est envolé de 27 %, celui du palladium de 30 % Quant au caoutchouc, sa hausse au cours de la dernière année atteint les 16 %. Sans parler de l’envolée des cours de l’énergie. Conséquence : le coût de production d’un véhicule électrique a augmenté de 4 500 € par rapport à 2020. Cela pèse en premier lieu sur les équipementiers, mais également chez les constructeurs. Chez Renault par exemple on estime l’impact à hauteur de 797 millions d’euros. Après avoir augmenté les prix de ventes de leurs voitures afin d’améliorer leurs marges, les constructeurs ne peuvent répercuter la totalité de cette inflation. Depuis trois ans, le prix des véhicules neufs a bondi de 20 %. Et il paraît bien difficile de faire supporter au client l’entièreté totale des hausses en cours et à venir. Car s’il y a reprise des volumes de production, les cours des matières premières vont continuer à s’envoler. Du coup certaines marques jouent la prudence quant à l’avenir.

Optimisme raisonné

La présidente de GM, Mary Marra, ne cache pas ses craintes « concernant les conditions économiques » au point « d’avoir également modélisé de nombreux scénarios de ralentissement. » Même son de cloche chez Volkswagen. « Nous nous attendons à ce que l'impact des prix des matières premières et de l'énergie soit nettement plus élevé au second semestre 2022 qu'au premier semestre », déclare Alexander Seitz, directeur financier de Volkswagen.

Malgré la hausse des prix des matières premières et de l'énergie, les constructeurs revoient leurs perspectives à la hausse. « Nous sommes convaincus que nous pourrons largement compenser ces hausses de prix et poursuivre notre tendance positive. C'est pourquoi nous relevons nos perspectives, à condition que la situation de l'offre évolue conformément aux attentes. Pour l'ensemble de l'année 2022, nous visons désormais un retour d'exploitation sur les ventes avant éléments spéciaux de 4 à 5 % », assure le directeur financier VW. Renault revoit également ses perspectives financières à la hausse pour 2022. Comme la quasi-totalité des constructeurs. On parle de crise automobile ! Quelle crise ?