Reportage : 45 minutes chrono, de Victoria à Curepipe

il y a 2 années, 1 mois - 11 Octobre 2022, Le Mauricien
Reportage : 45 minutes chrono, de Victoria à Curepipe
Le trajet de Port-Louis à Curepipe en 45 minutes chrono ! Qui dit mieux ? Certainement pas les milliers d’automobilistes qui rongent leur frein tous les matins à l’heure de pointe…

Le projet a démarré en 2017 et cinq ans après, en 2022, le métro débarque enfin à Curepipe ! Le premier trajet inaugural se fera aujourd’hui en présence du Premier ministre, Pravind Jugnauth, et demain les Curepipiens et Vacoassiens pourront eux aussi parler de « métro, boulot, dodo » pour la première fois. Week-End a eu la chance de faire le dernier rehearsal trip vendredi après-midi, avant le grand dévoilement aujourd’hui. Pendant que l’équipe de Metro Express Limited (MEL) et son CEO Das Mootanah, présents dans le tram à partir de Phœnix, étaient occupés à faire le fine tuning, nous avons eu le temps de enjoy the ride et de découvrir les hautes Plaines Willems autrement.

15h20. Direction la station de Victoria. Marrant d’utiliser ce terme, alors que l’on s’est habitués à utiliser « la gare » pour les transports en commun et « station » pour quelque chose d’autre… Un encart linguistique qui prouve que ce nouveau mode de transport et de vie est finalement bien entré dans nos mœurs. Donc, direction la station de métro, bondée de monde. Bref, après un brin de causette avec les contrôleurs de gare — d’une politesse louable, admettons-le —, nous commençons notre balade vers… Curepipe. Dans le métro, tout le monde est calme et attend patiemment assis la prochaine… station. Comme d’habitude, beaucoup de jeunes et de seniors. L’on aura beau faire ce trajet plusieurs fois, il faut dire que l’expérience en métro dans une petite île comme la nôtre est… « fun ». L’on se croirait presque en Europe, comme le disent souvent ceux qui l’empruntent pour la première fois. Rapide, confortable, loin du chahut et des klaxons de voitures, dans le car du métro, tout le monde kas une poz, même ceux qui ont eu une place debout.

La première partie du trajet de Victoria à Quatre-Bornes central, on la connaît déjà pour l’avoir parcourue plusieurs fois ces derniers mois. D’ailleurs, c’est la partie Victoria-Coromandel qui reste la plus belle, avec une vue sur les chaînes de montagnes de Moka… Une manière de redécouvrir les contours d’une île que l’on a appris par cœur dans notre Atlas lors de nos classes d’EVS. Une île que l’on a vu changer à vitesse grand V sans vraiment se rendre compte de sa beauté, de ses paysages, de ses montagnes, de ses champs de canne. Eh oui, comme dit plus haut, dans le métro, l’on « casse sa pause » et Week-End ne s’est pas privé. À 15h49, à la station de Trianon, le métro est quasiment vide avec une dizaine de passagers. Et en trois minutes à peine, nous arrivons à la station de Phœnix. Tout le monde débarque, sauf l’équipe de Week-End, attendant impatiemment de continuer le trajet vers Curepipe.

En voyant le train prendre l’autre voie, l’on se rend vite compte qu’on doit aussi descendre, croyant avoir pris le mauvais train. Finalement, sur la station de Phœnix, une équipe de techniciens de MEL attend aussi et nous indique gentiment qu’il faudra prendre le prochain métro. « Les trial runs ont fini depuis 14h, là on attend le rehearsal train pour le lancement. » Effectivement, les trial runs pour la phase 2c du projet (Phoenix/Curepipe) ont commencé le 21 juillet. Après quelques minutes d’attente, le tram 108 pointe le bout de son nez et l’on commence à sentir l’électricité dans l’air. À bord, le CEO de MEL, Das Mootanah, et son équipe font les derniers ajustements pour le jour-J. Dans la cabine du conducteur, le train captain est concentré. À 16h10, le métro commence le trajet. Et nous voilà partis pour à peu près 20 minutes de voyage.

Au premier carrefour de Jumbo, les voitures attendent, les policiers sont aux aguets et nous, on prend place pour profiter du paysage. Un paysage nouveau et différent de ce que l’on connaît, car en autobus ou en voiture, l’on ne prend pas autant de hauteur, de distance. En deux minutes, on arrive à la belle station de Phœnix Hall Station. Cette station ne figurait pas dans le plan initial et ne figure donc pas sur la carte affichée dans les métros. Elle s’ajoute à la liste des six nouvelles stations. Celle-là, dès le début des travaux, a tout de suite attiré les regards. Moderne, spacieuse et recouverte de verre, elle est devenue, mine de rien, un petit écrin dans cette partie de l’île très fréquentée. Elle tombe aussi à point nommé pour ceux souhaitant aller flâner dans les galeries commerciales de Phœnix Mall. Une fois la station Phœnix Hall dépassée, direction cell de Palmerstone. Mais avant cela, profitons de la vue de la belle bâtisse de l’Indira Gandhi Cultural Centre et du World Hindi Secretariat couleur terracota.

À 35 minutes de la capitale et des paysages ensoleillés, l’on se retrouve d’un coup dans un tout autre environnement entre fraîcheur et bâtiments historiques. Après Palmerstone qui présente néanmoins une petite faille — les habitants de Phœnix doivent traverser l’avenue Sivananda s’ils veulent y avoir accès —, place à la station Vacoas Central. Avant cela, des travailleurs en survêtement fluo s’affairent à peaufiner les travaux et encore une fois, tous s’arrêtent pour laisser passer le train ou pour le laisser siffler, comme le chantait Richard Anthony. Ce paysage vacoassien, on le découvre autrement, entre ses maisons, ses blocs d’appartements, ses SMF Quarters et sa vieille gare routière. Au carrefour de CEB, avant la station de Sadally — dont le pont a été rénové —,  le trafic de voitures a augmenté à l’heure de pointe, mais avec l’aide des officiers sur place, le tram continue sa route. « On a fait plusieurs campagnes de sensibilisation en amont de ce lancement », nous dit un des techniciens de MEL. « On a été à la rencontre des gens de la localité pour leur expliquer la nouvelle route. C’est un aspect très important pour nous », dit-il.

Après la station de Sadally, l’on se retrouve sur le légendaire « Sime Disik » pour arriver à la station de Floréal. Sur les rails, un chien un peu surpris de voir le métro se lance dans une course folle. Le conducteur freine et klaxonne, le temps de le laisser passer. « Ils vont s’habituer. C’est nouveau pour nos toutous aussi », nous lance une employée de MEL faisant partie de l’équipe qui nous accompagne. Encore une fois, au carrefour entre Floréal Square et la station-service Shell, les policiers s’occupent du trafic. Quelques minutes d’attente pour les automobilistes, ce n’est pas bien grave. Le paysage est à couper le souffle, encore une fois. Pour ceux qui ne connaissaient pas cette région, cela vaut le détour. De la station de Floréal à la station Curepipe North, des maisons, des temples, des églises défilent. Quelques habitants, dont des enfants de la région, se sont arrêtés pour voir passer le métro, comme beaucoup le font les dimanches pour aller voir en famille décoller et atterrir les avions…

Vue de haut, la ville lumière a une tout autre allure. Après cinq minutes de trajet à peine, en hauteur — car sur pilotis —, nous arrivons finalement à destination, à Curepipe Central Station. Celle-ci est aussi habillée de modernité comme celle de Phœnix Mall, ce qui change des stations de Trianon à Port-Louis. À côté, à gauche du bâtiment flambant neuf de la WMA, l’on a enfin vue sur Curepipe, à droite. Pincement au cœur, car pour ceux qui connaissent Curepipe, cette vieille ville s’est pendant longtemps laissé emporter par le temps et la fatigue. Les toitures de maisons aux couleurs pas très uniformes — et surtout recouvertes de « gomon » —  laissent penser qu’il aurait fallu un réaménagement urbain, mais cela étant dit, cela fait partie du charme mauricien, de son authenticité qui rime avec des gens qui ont « tracé » pour construire leurs maisons pierre par pierre. Après tout, face à la modernité avec l’arrivée du métro à Vacoas et à Curepipe, ces deux vieilles villes préservent leur charme historique.

Notre trajet s’arrête là. De Victoria à Curepipe, 45 minutes de trajet, de découverte, de redécouverte d’une île Maurice réelle non fardée, entre ses vieilles maisons collées les unes aux autres, ses nouveaux bâtiments multiétages, ses paysages à couper le souffle, ses innombrables lieux de culte… et surtout ses habitants qui ont fini par adopter le métro et à mémoriser le nom des stations, comme ils l’ont fait pour mémoriser les noms des « bus-stop ».

Metro Express : Le trajet Curepipe/Port-Louis coûtera Rs 55

La ligne Phoenix-Curepipe sera inaugurée officiellement, ce dimanche 9 octobre, par le Premier ministre Pravind Jugnauth et les opérations commerciales débuteront le lendemain, le lundi 10 octobre à 6 heures. Le prix du ticket pour le trajet Curepipe/Port-Louis a été fixé à Rs 55. Pour les étudiants, le prix est de Rs 30 et pour les enfants, Rs 27.

A noter qu’il y a sept stations de métro sur la nouvelle ligne entre Phoenix et Curepipe, notamment Phoenix Mall Station, Palmerstone, Vacoas, Sadally, Floréal, Curepipe Nord et Curepipe Central.

Metro Express à Curepipe : Un tram toutes les 10 minutes

Les habitants de Curepipe et du Sud accueilleront, ce lundi 10 octobre, le Metro Express à Curepipe. Les opérations commerciales débuteront dès 6 heures avec le premier tram qui quittera la station Curepipe Central pour se diriger vers Port-Louis. Un autre tram devrait faire le même trajet aux mêmes heures dans l’autre sens (de Port-Louis à Curepipe).

A noter que les heures d’opération du Metro Express sur cette ligne ont, dans un premier temps, été fixées de 6 h à 19 h tous les jours. Après la mise en opération de cette ligne, Metro Express continuera les travaux de la ligne Rose-Hill/Réduit qui devraient prendre fin vers la fin de l’année. Rappelons aussi que deux autres extensions ont été annoncées, notamment, Curepipe/La Vigie et Réduit/Côte-d’Or.