Voitures électriques : pourquoi le temps de charge n’est jamais prévisible ?

il y a 4 années, 2 mois - 17 Septembre 2020, automobile-magazine
Voitures électriques : pourquoi le temps de charge n’est jamais prévisible ?
Le bug des superchargeurs Tesla, qui permet depuis quelques jours à n’importe quelle voiture électrique d’y être branchée gratuitement rappelle, au-delà de cet épiphénomène, que le chargement d’une voiture électrique dépend de nombreux paramètres et qu’il n’est jamais vraiment prévisible.

On vous explique.

Un réseau encore faible
Dans le merveilleux monde de la voiture électrique pour tous, le voyage est une nouvelle expérience. On prend son temps pour parcourir les kilomètres. Il est facile de s'arrêter pour "faire le plein", car les bornes de recharge rapides pullulent sur l'espace public. A peine le temps de se dégourdir les jambes ou de prendre un café que le plein d'électricité est déjà fait. Magique. Mais dans la vraie vie, la musique est tout autre.

En France, à peine 30 000 points sont ouverts au public à ce jour et seul 6 % d'entre eux sont de capacité supérieure à 50 kW. Pour le moment, recharger son véhicule électrique n'est donc pas chose aisée. Et n'allez pas croire que la simple multiplication des bornes solutionne tout à l'avenir. Les pouvoirs publics ont beau avoir pour objectif 100 000 points de recharge d'ici 2022 en Hexagone, faire le plein d'électricité ne sera jamais aussi rapide que de remplir un réservoir, car les paramètres à prendre en compte pour une charge optimale sont nombreux.

La capacité du point de recharge
D'abord, tout dépend évidemment de la capacité de la borne sur laquelle la voiture est branchée. Mais pour le savoir, il ne suffit pas de regarder ses caractéristiques. Si les derniers superchargeurs Tesla "V3" offrent une puissance théorique maximale de 250 kW désormais non-partagée, ce n'est pas forcément le cas des bornes Ionity, dont les 350 kW de puissance officielle peuvent être divisés si plusieurs voitures sont branchées au même moment au même endroit. Si vous êtes seul, vous aurez la pleine puissance mais s'il faut partager, elle baissera d'autant.

Par ailleurs, il ne faut pas non plus oublier le réseau qui alimente les stations de superchargeurs. Certaines, éloignées des centres-villes, peuvent ainsi voir leur flux d'électricité réduit si les infrastructures et câblages sont insuffisants. Or il est impossible de le savoir en amont.

Le constat vaut aussi à son propre domicile, où toutes les prises ne peuvent pas fournir la même puissance selon les câblages qui les alimentent. Pour ne pas faire disjoncter les dispositifs, les voitures électriques testent systématiquement la ligne sur laquelle elles sont branchées pour ne prendre que ce que la ligne peut leur fournir. En caricaturant, selon comment est faite l'électricité dans votre maison et ce que tolère votre compteur, allumer le four peut allonger de quelques minutes le temps de charge de la voiture. Mais rien de nuisible au quotidien.

La capacité de la batterie
Dans un second temps, la vitesse de recharge dépend de la capacité structurelle de la batterie à emmagasiner de l'énergie. Une donnée qui se calcule en kWh à ne pas confondre avec la puissance que peut délivrer l'accumulateur au moteur électrique calculée, elle, en kW. A ce petit jeu, tous les constructeurs ne sont pas égaux et Porsche est pour l'instant le plus fort, avec une Taycan dont la batterie accepte par exemple jusqu'à 270 kW. Sur le réseau Ionity, l'allemande récupère ainsi jusqu'à 75 % de son autonomie en 25 minutes. Mais n'allez pas croire qu'une Peugeot e-208 ou une Renault Zoe rempliraient leur accumulateur encore plus vite que la Porsche sous prétexte qu'il est bien plus petit. La Lionne, dont la batterie développe 50 kWh, ne peut avaler plus de 100 kW de courant continu, si bien qu'elle récupère elle aussi 80 % de sa charge en une demi-heure.

Des conditions d'usage déterminantes
Enfin, l'usage de la batterie est primordial pour aborder la recharge. Si vous sortez d'une portion d'autoroute, la batterie a besoin de refroidir avant d'offrir sa capacité maximale de recharge. Au moment de brancher, une partie de l'énergie fournie par la borne sert ainsi au refroidissement. Pour la Taycan, un sur-refroidissement liquide est d'ailleurs entamé en amont de la recharge, ce qui puise aussi un peu plus dans l'autonomie. Quoiqu'il en soit, la voiture se charge une nouvelle fois d'optimiser toute seule et attend le temps nécessaire avant d'ouvrir les vannes. Mais le temps de refroidissement est, une nouvelle fois, incalculable en amont.

En résumé
Par leur fonctionnement opaque, les voitures électriques détiennent encore pas mal de secrets. Notamment en ce qui concerne la recharge. Les capacités des chargeurs et des batteries sont des données primordiales mais pas suffisantes pour calculer exactement le temps de recharge de votre auto. Compte-tenu des nombreux paramètres, il est en réalité impossible de savoir exactement le temps du "plein". La durée de recharge étant déjà un des principaux freins à l'achat des modèles "zéro émission", ses variations incalculables, bien qu'elles n'oscillent pas du simple au triple, n'aident pas à franchir le pas sereinement. Surtout face aux 3 minutes incompressibles mais non-extensibles nécessaires pour remplir un réservoir.