Depuis le tournant du siècle, soit il y a 20 ans de cela, en jeune homme d'affaires avisé, il a insufflé un nouvel élan au business familial en multipliant les initiatives avec des opérations de location de voitures, d'hébergement pour touristes et dans le domaine de l'impression. Il s'est permis d'imprimer ses marques à la direction du gîte La Cabane d'Été à Baie-Malgache. Et il est également un membre actif de l'Association des Touristes de Rodrigues. Il a connu l'aventure dans le secteur de l'aviation civile au sein de Catovair dans une tentative de donner des ailes au tourisme à Rodrigues. Mais avec la pandémie de COVID-19, même s'il n'y a aucun cas dans son île natale, Phanuel Lévêque voit ses rêves s'envoler.
« Avec le confinement, nous avons fait fonctionner les machines dans l'imprimerie, les voitures aussi. Nous avons profité de ce temps aussi pour nettoyer le gîte comme il se doit. Il n'y avait rien d'autre à faire », déclare Phanuel Lévêque avec un pincement au coeur. Et le déconfinement n'est pas pour autant porteur de signes encourageants pour ce jeune entrepreneur qui a toujours cru et qui croit encore en son île natale.
« Dans la conjoncture et en dépit du déconfinement, qui complètera sa première semaine, ce qui nous inquiète vraiment c'est le tourisme. Pas d'avion, pas de bateau, pas de travail. Avec le temps, si tout ne retourne pas à la normale, nous allons faire face à une pénurie de matériels pour l'imprimerie, l'encre surtout. Mais à Rodrigues les gens se concentrent davantage sur le quotidien et fait très peu cas de l'état de notre économie. Le fait que les regroupements publics soient interdits fait que la location de voitures est en panne », poursuit Phanuel Lévêque, qui attire l'attention sur les risques de pénurie alimentaire dans l'île.
« À garder en tête que même le côté alimentaire sera affecté car certains aliments que nous importons depuis Maurice commencent déjà à manquer dans l'île », dira-t-il. Et celui-ci de noter par ailleurs : « La population qui dépend surtout du secteur touristique sera extrêmement affectée. Le tourisme est le secteur qui sera vraisemblablement le plus affecté dans notre île. Il n'y a plus de connexion aérienne entre Maurice et Rodrigues, et cela touche directement ce secteur. Les personnes qui vivent de l'artisanat et de l'hébergement sont également parmi les premières affectées par la crise découlant de la pandémie du coronavirus. »
Même si la reprise de la desserte aérienne constitue un élément crucial pour le tourisme, Phanuel Lévêque n'est pas en faveur d'un retour précipité des ATR-72 d'Air Mauritius dans l'île. « Personnellement, j'aurais préféré que ces vols soient principalement opérés pour apporter des vivres uniquement, soit des vols d'avion-cargo. Le choix est entre faire rouler l'économie ou sauver la vie des gens. J'espère que des mesures sanitaires strictes seront prises afin de minimiser le risque de contamination. Car j'estime que si cette pandémie atteint notre île, ce sera un coup dur pour la population rodriguaise qui ne saura pas comment gérer une telle crise », confie-t-il.
Le jeune entrepreneur place beaucoup d'espoir dans le budget, qui sera présenté le 30 avril à l'Assemblée régionale de Rodrigues par le chef-commissaire, Serge Clair. « A ce jour, les autorités ont assez bien géré la situation jusqu'ici, car nous n'avons eu aucun cas positif à Rodrigues. Un point positif crucial », reconnaît-il en ajoutant que « la solution serait que le gouvernement régional apporte davantage de soutien aux PME de l'île. Que le gouvernement trouve des mesures à court terme pour que ces employés du secteur des PME arrivent à conserver leurs emplois ! Que des délais de paiement soient étendus et que des aides financières soient offertes aux petits entrepreneurs ! Le gouvernement régional et le secteur privé se trouvent dans le même bateau alors j'espère qu'ils accorderont tout leur soutien aux PME et ce, sans réserve. »
En conclusion, Phanuel Lévêque regrette cette sur-dépendance alimentaire de Rodrigues sur Maurice. « Nous n'avons pas totalement coupé le cordon avec Maurice, car c'est de là-bas que beaucoup de nos importations viennent, alors il faut toujours être sur le qui-vive et maintenir les mesures de précaution. Il est clair que dans un mois ou deux si les choses ne reviennent pas à la normale, cela ne va être nullement facile pour la population de l'île », conclut-il tout en faisant confiance au sens de la débrouillardise des Rodriguais.
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