Révélations de «Missie Moustass»: «Dip» trouble

il y a 1 semaine - 28 Octobre 2024, lexpress.mu
Anil Kumar Dip, le Commissaire de police
Anil Kumar Dip, le Commissaire de police
Il navigue en eaux troubles. Alors que les appels à la démission se multiplient dans le sillage des révélations de Missie Moustass, il s’accroche fermement à sa «casquette»,

celui-ci allant même jusqu’à organiser un point de de presse durant la semaine écoulée mais lors de laquelle il a refusé de répondre aux questions des journalistes… Contradictoire, dîtesvous ? Il faut dire qu’Anil Kumar Dip, 64 ans, commissaire de police (CP) depuis février 2022, n’en est pas à sa première polémique…

Parvenu aux plus hautes sphères de la police après plus de 40 ans de service, ce natif de Rose-Belle est ainsi aujourd’hui au cœur d’un nouvel orage médiatique. Anil Kumar Dip avait promis de redorer l’image de la police, notamment en s’attaquant au fléau de la drogue et en éradiquant les pratiques opaques. Pourtant, la diffusion de bandes sonores de Missie Moustass l’implique dans une tentative de dissimulation de bavure policière grave ayant conduit à la mort de Jacquelin Steeve Juliette, de manipulation de l’autopsie, dans des soupçons d’ingérence dans le dossier de son fils Chandra Prakashsing Dip auprès de la Commission de pourvoi en grâce ou encore dans ces cas de potentielle corruption. Entre accusations de dissimulation dans des affaires sensibles, tensions avec le Directeur des poursuites publiques (DPP), et rumeurs d’interventions controversées, l’ascension et les choix de ce CP, qui ne semble pas prêt à renoncer à son poste malgré une enquête en cours sur les bandes sonores de Missie Moustass, sont des sujets de préoccupation, qui provoquent la colère et la révolte de la population.

Il faut dire qu’Anil Kumar Dip a eu une carrière parsemée d’incidents retentissants. Il rejoint la force policière à l’âge de 21 ans, en 1981, et grimpe progressivement les échelons. Ancien de la Special Mobile Force (SMF) et détenteur de diplômes en Police Science and Management de l’université de Portsmouth, il s’impose dans divers rôles stratégiques : commandant de la SMF, directeur du National Emergency Operations Command et plusieurs postes à responsabilités. Sa nomination au sommet de la police en 2022 marque l’accomplissement d’une carrière teintée de distinctions mais aussi de polémiques, notamment l’expérience unique d’une nuit passée en détention.

Affaire Bramer Bank : l’ombre d’une arrestation

En 2013, Dip devient le premier CP mauricien à faire face à une détention, suivant une présumée implication dans un détournement de Rs 80 millions au détriment de la défunte Bramer Bank. Lavé de toutes charges, Dip retourne au sein de la police et intente une action contre l’État, réclamant Rs 50 millions pour arrestation abusive. Bien que disculpé, cette affaire reste gravée dans la mémoire collective, surtout en raison de l’implication de son fils, présumé cerveau du détournement. Aujourd’hui, ce dernier fait face à la justice, une situation qui nourrit les spéculations sur les liens familiaux et l’influence au sein même de la police.

Duel juridique avec le DPP : défi sans précédent

Déterminé à asseoir son autorité, le CP Dip engage un bras de fer inédit avec le DPP, contestant le pouvoir constitutionnel de ce dernier dans plusieurs affaires retentissantes. Cette querelle, déclenchée par la libération de l’activiste désormais politicien Bruneau Laurette, s’est intensifiée autour de différends idéologiques et de juridictions : Dip accuse le DPP de ne pas protéger suffisamment l’État, alors que le DPP insiste sur son rôle de neutralité judiciaire. Le CP Dip, cherchant à défendre sa vision de la justice, a même tenté d’engager des avocats privés dans des affaires d’État – une démarche controversée, qui avait été rejetée par la Cour suprême. Le jugement de cette dernière sur la plainte constitutionnelle déposée par le CP contre le DPP est attendu.

Controverse sur des véhicules de fonction

Récemment, le CP a aussi été critiqué pour les acquisitions controversées de l’achat de voitures de fonction. Il fait désormais face à de graves accusations dans l’acquisition de véhicules, selon une lettre de dénonciation adressée à la Financial Crimes Commission (FCC), au Premier ministre et aux salles de rédaction. Le corbeau allègue dans cette missive qu’«Anil Kumar Dip utilise trois voitures de fonction neuves, d’une valeur totale de Rs 22 870 880 et financées par l’argent des contribuables, pour ses proches et lui-même». Il fait valoir qu’il s’agit d’un délit sous l’article 22 de la FCC Act de 2023, qui concerne l’abus de pouvoir, plus précisément, de «public official using his office for gratification».

Selon cette lettre, le CP a droit à une voiture de fonction, dans la limite d’une valeur maximale prescrite, pour un usage officiel et privé, et à une allocation mensuelle pour le carburant et une indemnité pour chauffeur ou aux services d’un chauffeur. En résumé, Dip aurait utilisé l’argent des contribuables pour acheter deux voitures de luxe pour l’usage de sa fille et de son fils. Prix de la Porsche Macan et de la BMW X6 ? Rs 16 920 880… L’enquête de la FCC est toujours en suspens.