C'est un petit signal d'alerte qui vient d'un personnage dont on attendait pas franchement un tel avis tranché sur le sujet. D'autant plus que le job de Tom Blackie, c'est PDG de VNC Automotive, un gros acteur de la télématique, de la connectivité et des systèmes embarqués tels que les écrans tactiles. Le patron britannique s'exprime dans un communiqué on ne peut plus officiel sur la prolifération des écrans dans les automobiles depuis quelques années. Et l'homme n'y va pas de main morte en annonçant que ces mêmes constructeurs sont "coincés dans une course", ajoutant : "pas le genre de course sans fin à la puissance ou à la réduction du temps pour atteindre les 100 km/h, cette compétition là se jouant plutôt en pouces (en référence à la taille des écrans)". Il met effectivement le doigt sur un phénomène qui n'est pas nouveau : la quête perpétuelle de performance sur les modèles grands publics est abandonnée au profit de la technologie. Plus de technologies, mais surtout plus d'écrans, quitte à déconcentrer complètement le conducteur.
Des alternatives à l'écran tactile pas toujours convaincantes
La loi ainsi faite qu'elle sanctionne la personne qui regarde l'écran de son smartphone au volant, mais pas celle qui a les yeux collé sur l'écran embarqué du véhicule. Vous ne pouvez donc pas taper une adresse sur le GPS de votre téléphone, mais vous pouvez le faire avec cet affichage numérique au centre de la planche de bord, aux fonctionnalités toujours plus étendues.
Au point, d'ailleurs, d'inciter les constructeurs à ne plus concevoir de commandes physiques du tout. Et n'allez pas croire que c'est plus cher : regrouper la climatisation, la navigation, les paramètres de son auto, la musique et tout l'infotainment sur un seul écran est bien moins coûteux que de produire des boutons, des molettes de réglage et une console centrale élaborée. En clair : la planche de bord d'une Tesla Model 3 pose bien moins de problèmes de coûts de développement que celle d'une auto où l'on peut encore actionner la climatisation sans passer par un écran.
Avec tous ces écrans, il est de plus en plus tentant de ne plus regarder la route en conduisant. Des études ont déjà montré que le conducteur pouvait quitter des yeux la route pendant plus de 20 secondes seulement pour trouver une chanson sur Spotify. En 2008, déjà, des publications sur le portail Cairn s'arrêtaient sur le "trouble" de l'attention des automobilistes notamment face à des distractions numériques.
Alors que faire ? Les constructeurs ont plusieurs solutions pour remettre de le regard du conducteur dans l'axe de la route. La commande gestuelle, d'abord, qui permet notamment de gérer certaines actions sur l'écran sans le regarder. Mais cette solution s'est pour l'instant montrée relativement bancale et pas franchement convaincante. Il reste alors les ATH (affichage tête haute) associés à la commande vocale, il est vrai de plus en plus aboutie grâce au travail des mastodontes que sont Amazon (Alexa) et Google. Mais tout ceci ne remplacera pas les bonnes vieilles commandes physiques : il a déjà été prouvé que le système à molette iDrive de BMW était le plus sûr en matière de conduite. A l'inverse, le tout tactile est ce qu'il y a de pire !
Déléguer les écrans au passager ?
VNC Automotive étant une entreprise spécialisée dans les solutions connectées embarquées (35 millions de véhicules équipés dans le monde), ne nous y trompons pas, elle n'ira pas jusqu'à se tirer une balle dans le pied et dénigrer son propre business. Simplement, son PDG rappelle que trop d'écrans tue les écrans et que certains (Honda e et Mercedes EQS sont citées) vont peut-être un peu trop loin. Mais se fourvoient ils pour autant ? La solution pourrait en effet être... plus d'écrans ! En effet, les affichages numériques dédiés au passager avant permettraient théoriquement de décharger le conducteur de certaines actions. Mais encore faut-il qu'il ne soit pas seul dans son véhicule, et si vous regardez autour de vous le matin et le soir sur le trajet domicile/travail, vous trouverez probablement une majorité de véhicules vides. En clair, nous ne sommes pas plus avancés, mais une chose est sûre : les écrans font économiser de l'argent aux constructeurs. Au détriment des plus grands principes d'ergonomie.
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